mercredi 27 juillet 2011

CAPI n°35 Nous sommes tous contre le faschisme

CAPI – Cahiers d'Autoformation Psychosociale en Pédagogie institutionnelle
GROUPE D’AUTOFORMATION PSYCHOSOCIALE
Association pour le développement de l’autonomie et de la participation sociale
Siège social : 40, rue Saint-Lô, BE 5060 FALISOLLE,
Président Patrick LECEUX 0496/627678 patrick.leceux@mac.com
Coordination pédagogique Jean-Marie LANGE: gap.belgique@skynet.be ;
Groupe d'Autoformation Psychosociale : Formations des adultes et actions humanitaires.
L'association de formation des cadres GAP est une asbl spécialisée en management associatif et en prévention des conflits de groupe. Elle se veut résolument sans but lucratif; aussi, lorsqu'elle dégage un quelconque bénéfice, elle conçoit le projet d'une aide humanitaire technique et ciblée au Tiers Monde. Hier, il s'agissait de formations d'animateurs ruraux et d'animateurs de gestion au Mali. Aujourd'hui, c'est l'aide à des associations locales à MAKAMBA au sud Burundi. Demain ce sera le soutien à des écoles fondamentales au pays DOGON (Mali). Notre association n'est pas subsidiée par la coopération au développement de Belgique. Le GAP est un opérateur de terrain qui se réclame de l'application des droits de l'homme et ne se réfère à aucune confession et à aucun parti politique.
Site http://soutien.et.autonomie.free.fr Blog : http://gap-belgique.blogspot.com;


CAPI – Cahiers d'Autoformation Psychosociale en Pédagogie institutionnelle -
SOMMAIRE des précédents articles de cette revue bimensuelle de réflexions pédagogiques du GAP
N°1 – Janv-Fév. 2006 : Qu'est ce que le GAP ?
N°2 – Mars-Avril 06: Le cahier des offres de formation du GAP.
N°3 - Mai-Juin 06 : La colère des enseignants (gestion des conflits – opus 1)
N°4 – Juill.-août 06 : La pensée rationnelle (gestion des conflits – opus 2)
N°5 – Sept.-Oct.06 : Totem et tabou
N°6 – Nov. Déc. 06 : Jalousie et fonctionnement à la croyance (Médiation couple – opus 1)
N°7 – Janv.Fév. 07 : L'Avant-projet pédagogique BURUNDI
N°8 – Mars-Avril 07 : La Dynamique des Groupes, l'organisation sociale et l'homme de la singularité.
N°9 – Mai-Juin 07 : Histoire de vie en groupe et aide sociale (Proposition au Congrès international des professionnels francophones de l'intervention). Pédagogie du projet.
N°10 – Juillet-Août 07 : Rapport d'activité "Enfants de Kayoba" première phase "Voyage d'études et de faisabilité 2007"
N°11 – Sept.Oct.07 : Le chaman et le formateur
N°12 – Nov.Dec. 07 – L'identité personnelle, une insertion sociale ?
N°13 – Janv.Fév.08 – La genèse des alchimistes pour l'éducation à une spiritualité laïque
N°14 – Mars-avril 08 - Le travail des intervenants sociaux (1) : Pour une insertion sociale et multiculturelle citoyenne.
N°15 – Mai-Juin 08 – Le travail des intervenants sociaux (2) : Emploi, travail et méthodes d'intervention.
N°16 – Juillet-Août 08 – Le travail des intervenants sociaux (3) : Fantasme de toute puissance, démocratie ou génocide.
N°17 – Sept. Oct. 08 : La souffrance du désir et le détachement
N°18 – Nov. Déc.08 : Le stress et les consciences
N°19 – Janv-Fev 09 : Le triangle rouge de la lutte contre tous les racismes
N°20 – Mars-Avril 09 : La psychologie des émotions.
N°21- Mai-juin 09 : La raison sensible (combattre les fidèles au nom des infidèles).
N°22 – Juill-Août 09 : Le néant et l'être affamé
N°23 – Sept-Oct 09 : Multiculturalisme et autoformation
N°24 – Nov.-Dec.09 : Les Etats Modifiés de Conscience (extase, possession, hypnose et zen)
N°25 –Janv-Fev 2010 La matière, le vide, la nature, l'éducation
N°26 – Mars-Avril 2010 L'intelligence des femmes
N°27 - Mai-Juin 2010 L’imaginaire, le symbolique et la réalité sociale
N°28 – Juil-août10 : Pour une introduction à l’anthropologie culturelle et sociale
N°29 – Sept-oct10 : Le combat perpétuel de la démocratie participative
N°30 – Nov-dec10 : Les sans-papiers
N°31 – Janv-Fév 11 : le couple et l’institution du mariage (Médiation couple - opus 2)
N°32 – Mars –avril 11 : La psychologie systémique et le chamanisme
N°33 – Mai-juin 11 : Vers une éthique sociale contre les barbaries
N°34- Juil-août 11 : La sexualité, l’éthique et le pouvoir
N°35 – Sept-oct 11 : La Noosphère : attachement et détachement


CAPI – Cahiers d'Autoformation Psychosociale en Pédagogie institutionnelle N°35 Sept-oct 2011

La NOOSPHERE : L’attachement et le détachement psychologiques de SCHOPENHAUER Arthur[1]
« Nous ne voyons pas le réel mais les représentations que nous en avons. »(EPICTETE)
« Sois à toi-même ton propre flambeau. »(BOUDDHA)
« Les causes qui viennent de nous contribuent plus au bonheur que celles qui viennent des choses. » METRODOTE premier élève d’EPICURE
« Plus l’esprit connaît de choses, mieux il comprend et ses propres forces, et l’ordre de la Nature : or, mieux il comprend ses propres forces, plus il lui est facile de se diriger et de se proposer des règles ; et mieux il comprend l’ordre de la Nature, plus il lui est facile de se garder des inutilités. »[2]
Pour Arthur, la force physiologique privilégiée est celle de la réflexion intellectuelle. Nous prenons appui sur nos deux jambes pour assurer notre stabilité de bipède. Nous pourrions dire qu’une d’entre elles est la colonne Boaz, la force et l’autre (que nous retrouvons dans son œuvre principale « Le monde comme volonté et comme représentation »), la colonne Jakin, la volonté. La volonté de vivre commence avec celle de naître et de se développer, regardons des nouveau-nés, certains ont un bon tonus musculaire et d’autres sont un peu « flasques ». Le problème de notre langue, c’est que les mots peuvent être polysémantiques. Je pense que, dans l’esprit d’Arthur, il s’agit bien de l’énergie vitale et non d’une illusion de notre persona (personnalité inventée) qui peut donc parfois glisser vers l’énergie sexuelle et l’impossible satisfaction du désir. Pour reprendre ce point essentiel, nous avons la matière physique dont chez l’homme la force intellectuelle est la spécificité et l’énergie ou volonté. A l’orée de l’automne, la feuille jaunie tremble car elle sait qu’elle va mourir ; pourtant, elle n’est qu’une forme de la matière et au printemps, l’arbre reverdira.


Nous sommes des êtres capables de langage, de réflexion et d’imagination, nous pouvons être créatifs, inventer l’impensé mais aussi anticiper notre inéluctable disparition, l’angoisse de mort ; nous ne pourrons donc qu’être subjectifs même si nous voulons atteindre l’objectivité scientifique. Suis-je mal dans ma vie ou suis-je avec des moments de bien-être, voilà bien une question de représentation.
Le prisonnier seul dans sa cellule (Le mur de Sartre) peut se créer des instants de bonheur tout comme le millionnaire dépressif peut lui en être incapable. L’argent, le sexe et le pouvoir peuvent être des outils de griserie mais deviennent à terme des leurres. De Fidel Castro à Silvio Berlusconi, de Murdock à Bill Gates, cela fatigue mais pourtant cela attache, comme une tâche indélébile ; les leaders ne veulent pas céder le pouvoir et on enterre les millionnaires en bouchant les espaces de leur cercueil avec des billets de cent dollars car ils sont tous, comme la feuille et nous, éphémères.
Qu’est-ce qui se passe en nous ? Notre sensibilité, notre volonté et nos pensées sont déterminantes sur nos vies malgré les influences externes sociales. Nous sommes des êtres grégaires; nous avons bien sûr besoin du regard des autres pour exister, être reconnus mais après ? Selon la typologie de MASLOW, cette reconnaissance minimale sociale est une condition nécessaire mais non suffisante, le stade de développement suivant est de se réaliser comme l’artiste qui n’est plus sensible à la critique mais qui fait confiance à son intuition, sa sensibilité. Un philosophe social de notre époque, Cornélius CASTORIADIS, parle lui de la sublimation des instincts par les artistes et ceux qui ont découvert l’éducation permanente. « Connais-toi toi-même » nous invite SOCRATE.
Toute conscience profonde est composée de deux moitiés : le sujet et l’objet. Chacun est collé dans sa conscience comme dans sa peau avec une moitié objective et l’autre subjective. Par exemple, deux personnes placées dans un milieu similaire peuvent vivre celui-ci de façon très différente.
Tout ce qui existe pour l’homme n’existe que dans sa conscience, le milieu extérieur a bien sûr du poids mais comme le pendule de Foucault, dans l’oscillation entre l’inné et l’acquis. Le verre de vin peut être à moitié plein ou à moitié vide, ce sont des images réfléchies, tout vient de l’orientation du penseur.
L’individualité et le bonheur de l’homme ne dépendent donc pas de sa fortune mais de ses forces intellectuelles qui fondent son aptitude aux jouissances. L’instruction peut être une aide mais la possibilité de jouissance est surtout dans l’esprit autonome. Pour quelqu’un de riche ou de puissant mais frustre d’esprit (Kadhafi, Bush, Chavez, Bart de Wever,…), le bien-être humain ordinaire, à demi-animal, est possible par les jouissances sensuelles mais limités par les frustrations. Alors que le monde croit que le bonheur est ce que nous avons ou ce que nous représentons, Arthur nous dit que notre bien-être dépend de ce que nous sommes, de notre individualité provisoire. Une bonne santé, un tempérament calme, une raison lucide et vive, une volonté tenace et douce feront ce qu’un homme est en soi-même, ce que nul ne saurait lui donner ou lui prendre.
Ce que l’on est contribue plus au bien-être que ce que l’on possède. La condition première pour une vie agréable est donc notre personnalité, entendue dans le sens de ce que nous sommes et non ce que nous imaginons être. Bien sûr, nous allons nous altérer physiquement avec le temps qui file, notre carcasse n’est guère une valeur durable et nos qualités physiques et intellectuelles déclineront, seul notre caractère moral demeure inaccessible à l’empreinte du temps et peut agir sa micro-influence sur notre communauté humaine. « Ce que la vertu a uni, la mort ne peut le séparer. » « Tu ne peux t’échapper à toi-même. Aucun temps, aucune puissance ne brise la forme empreinte qui se développe dans le cours de la vie. » disait GOETHE.
La souffrance et l’ennui sont les deux ennemis du bonheur humain et notre vie oscille souvent entre les deux maux. En effet, le besoin et la privation engendrent la souffrance tout comme l’aise et l’abondance font naître l’ennui. Entre ces pôles dialectiques antagonistes, nous pouvons trouver le juste milieu de la richesse intérieure de l’esprit (une spiritualité laïque et non un délire métaphysique). L’activité incessante des pensées et des méditations place l’esprit hors de portée de l’ennui et développe une sensibilité plus vive, une impétuosité de la volonté et des réalisations. Toutefois, les réalisations peuvent conduire à l’échec et à la douleur morale si le sujet s’attache à son projet et qu’il se retrouve face à un quelconque obstacle.
Schopenhauer[3] est un des premiers lecteurs de la philosophie bouddhiste : il faut agir bien sûr selon notre personnalité mais ne pas nous attacher aux fruits de nos actions, c’est ce que l’on appellera le lâcher-prise.
« La mort nous enlève jusqu’aux amis et parents. C’est à ce moment, plus que jamais, qu’il est important de savoir ce que l’on possède par soi-même. Il n’y a que cela, en effet, qui résistera le plus longtemps. A tout âge, sans distinction, cela est et demeure la source véritable du bonheur, la seule permanence. Car il n’y a pas beaucoup à gagner dans ce monde : la misère et la douleur le remplissent, ceux qui leur ont échappé, l’ennui les guette de tous les coins ; c’est d’ordinaire la perversité qui y gouverne, la sottise qui y parle haut. Le destin est cruel, les hommes pitoyables. »[4]
En bref résumé, pour le concept de force, Schopenhauer distingue trois forces physiologiques fondamentales :
La puissance reproductive du serpent : manger, boire, digérer, copuler et dormir.
La puissance compétitive du mammifère : la lutte, les parades sexuelles, les voyages, les jeux athlétiques, la chasse, les combats, la guerre.
La puissance de la sensibilité : contempler, ressentir, penser, étudier, lire, méditer, créer et philosopher.
Le premier rang selon le sage est celui qui nous distingue des autres espèces animales. Donc sans nier les deux premières forces, reconnaissons que la sensibilité propre à l’homme comprend nos forces intellectuelles que nous pouvons alimenter par la puissance de la connaissance. « Le repos sans l’étude est une sorte de mort mettant l’homme au tombeau tout vivant. »(SENEQUE)
Un autre handicap de l’homme est de travailler le tiers de son temps pour le seul profit de quelques-uns. On devrait tous être comme les élus belges payés plus de 404 jours pour ne rien faire (en principe chargés de constituer un gouvernement après leur élection) car il faut à l’homme du loisir pour se perfectionner, développer son esprit critique, interroger ses dogmes et autres certitudes, donc pouvoir jouir de ses richesses intérieures. Mon commentaire personnel est que je verrai bien nos peuples comme la famille royale ou les indiens Yanomami du Brésil vivre sans travailler en percevant tous une allocation de vie décente et uniquement ceux qui le veulent travaillent. Je suis sûr que même avec cette utopie activée, je retravaillerais mes 40 ans dans l’enseignement car cela fut un plaisir et une œuvre et non un labeur. Arthur nous parle également d’EPICURE qui divise les besoins en trois classes :
· Les besoins naturels et nécessaires bref facile à satisfaire (on retrouve le cerveau reptilien de MacLean).
· Les besoins naturels non nécessaires plus difficiles comme la satisfaction à la fois sexuelle et affective.
· Les désirs de luxe, d’abondance, de faste et d’éclat (de strass dirions-nous aujourd’hui) qui sont sans fin et difficiles voire impossibles à satisfaire car il manquera toujours un objet ou une quantité convoitée. La richesse et la gloire sont comme l’eau de mer, dit Arthur, « plus on en boit, plus on devient assoiffé. »
Dans ce que l’on possède, Schopenhauer n’inclut pas les femmes car on est plutôt possédé par elles, dit-il. L’honneur féminin, selon les conventions de son époque, était que la fille ne s’était donnée à aucun homme avant son mari. L’opinion d’Arthur est bien sûr un peu obsolète, bien avant l’émancipation féminine de 1968 pourrions-nous ajouter. Il nous dit :
« Le sexe féminin réclame et attend absolument tout du sexe masculin, tout ce qu’il désire, tout ce qui lui est nécessaire. Le sexe masculin ne demande à l’autre, avant tout et directement qu’une seule chose (« cocher » ndlr). Il a donc fallu s’arranger, en sorte que le sexe masculin ne pût obtenir cette unique chose qu’à la condition de prendre soin du tout, et par-dessus le marché des enfants à naître.(…) A travers de telles exagérations, on attribue à l’honneur sexuel une valeur absolue alors que, plus que tout autre honneur, il n’en a qu’une relative. On peut même dire qu’il possède une valeur conventionnelle. »[5]
En tant que psychologue du XXI° siècle, je me dois d’apporter un commentaire subjectif : on sent très bien la misogynie d’Arthur (celle de FREUD était plus discrète) mais cela n’enlève rien à la qualité de ses pensées dégagées de la gangue des normes de son époque. Nous sommes tous des êtres humaines égaux en genre et en ethnie, ce chemin du respect de tous les humains quel qu’en soit le sexe fait son chemin dans l’intelligentsia européenne mais a encore un long parcours à effectuer à travers le monde, je pense notamment aux mutilations sexuelles en Afrique pour « couper » le plaisir aux femmes avec leur clitoris enlevé, une barbarie inqualifiable contre laquelle je pense, même en étant pacifiste, qu’une guerre serait justifiée (i.e. libérer de l’assujettissement dans la souffrance la moitié de l’humanité féminine) car la femme est un homme comme les autres, disait dernièrement un slogan de marketing.
Depuis plus de 2000 ans, déjà du temps des romains, on inculque aux femmes des normes de soumission , d’allégeance et de fidélité alors que le pater familias lui peut prendre des licences ? Il faut en finir avec cette hypocrisie millénaire. Lors de la Commune de 1871, Louise Michel disait avec le style pompeux de l’époque « Oh Hommes, vous seriez plus heureux si vos femmes l’étaient aussi ! »
Occupons-nous de nous-mêmes, c’est le meilleur service à rendre aux autres, disait ainsi Arthur en 1851 soit environ deux siècles après son prédécesseur Baruch SPINOZA (1632-1677) : « C’est lorsque chaque homme recherche le plus possible ce qui lui est utile, que les hommes s’avèrent les plus utiles les uns aux autres (cor.2) »[6] On peut le dire autrement, la pensée humaine est un continuum : Arthur avait lu Goethe, le poète allemand de son époque (qui influencera JUNG) mais il avait lu aussi le hollandais Benoît SPINOZA tout comme FREUD aura lu Schopenhauer ainsi que Groddeck pour établir les assises de sa théorie, la psychanalyse. Nous n’écrivons jamais à partir d’une page blanche mais influencés par nos penseurs anciens.
Pour revenir à la misogynie de Schopenhauer qui était la norme de son époque et aussi de la suivante puisque FREUD l’était aussi, il serait donc intéressant à partir d’ici d’exercer notre esprit critique, ce qui précède étant la représentation de sages anciens. En effet, le cerveau permet la pensée et la pensée peut déboucher sur une philosophie ouverte ou parfois se retrouver enfermée dans la gangue d’une idéologie. Il est important d’explorer le monde des idées avec une perspective critique résolument humaniste.
Aujourd’hui, les blagues sur les femmes bimbos blondes existent toujours bien après l’après-guerre (sois belle et tais-toi !) et nous ne pouvons accepter de cautionner des positions racistes. Je l’ai déjà beaucoup écrit mais cela vaut la peine de le redire, le principal racisme fut l’esclavage (pratiqué aussi précédemment en Afrique du Nord) puis les relations de domination des hommes vis-à-vis du genre féminin de la même espèce et de la même ethnie (notamment à travers des mutilations, les pieds des chinoises par exemple), soit une bêtise profonde où l’objectif est de casser, de dévaluer, de juger mais de ne jamais faire de propositions constructives pour l’égalité humaine.
Alors prenons nos distances avec le misogyne Arthur, pas seulement avec la pensée (qui n’est jamais qu’une capacité fonctionnelle) mais avec l’esprit critique en réaction à notre monde d’aujourd’hui. J’écoutais hier un reportage de FR3 « Faut pas rêver » où des jeunes filles kényanes vierges étaient tout à fait décidées à se prostituer avec un blanc quel que soit son âge car c’était pour elles un moyen d’obtenir de la richesse, donc du bonheur. Je déplore bien sûr ce raisonnement stupide qui va faire de ces gazelles les proies sexuelles de prédateurs mâles peu scrupuleux mais il y a bien pire que ces donzelles de 16 ans qui ont leur libre-arbitre : le bébé que l’on va charcuter en coupant son clitoris et en cousant les lèvres de sa vulve (infibulation) et qui n’a pas la possibilité de choix. On lui dira plus tard : « c’était la coutume », mais sa vie sexuelle aura été brisée par des matrones « coupeuses » et bêtes. Un crime contre l’humanité, contre l’HABEAS CORPUS diront les anglais : on ne peut pas mutiler le corps d’un autre d’autant plus s’il s’agit d’un bébé ou d’un enfant d’âge tendre.
Les idées peuvent constituer un terreau de révolte pour l’esprit critique du libre-examen OU BIEN devenir une idéologie structurée, une religion ou encore un discours politique ou encore simplement s’inscrire dans les normes de fonctionnement d’une ethnie qui ne conscientise pas son crime et sa cruauté contre l’humanité de ces fillettes.
Le premier qui a récupéré sa biographie pour en faire une apologie ou idéologie politique fut NAPOLEON mais depuis la mode est toujours là. Par exemple, pour un monde plus social, plus fraternel et convivial, on ne cherche plus les critères objectifs comme la sécurité sociale, l’éducation, l’épanouissement de tous les êtres par une allocation d’argent décente mais, au contraire, on masque ces critères sous un discours poujadiste qui n’a plus grand-chose à voir avec les décisions concrètes au service du peuple. Henri LABORIT l’a dit très justement lors de son passage à la célèbre émission RTBF « Noms de Dieux » : « Peut-être que l’homme est une impasse ! Non je ne pense pas qu’il soit une impasse ; il suffirait qu’il n’y ait plus d’hommes politiques. Mais oui ! Ce sont les grands sauriens, ils sont encore à l’époque secondaire, et tout le monde les croit ! Alors que ce sont des dinosaures. »[7] Rappelons pour mémoire que lors de la fête nationale belge du 21.07.2011, il y avait une Belgique sans gouvernement depuis 404 jours grâce à un parti séparatiste flamingant (la N-VA) qui paralysait la majorité et menaçait indirectement le pays de scission entre la Flandre et la Wallonie francophone en absorbant Bruxelles comme capitale alors qu’il n’y vit que 6% de flamands.
Nous avons tous des préjugés qui, lorsqu’ils sont appréhendés en groupe, s’appellent des stéréotypes cognitifs, des croyances pas nécessairement métaphysiques mais basées sur la pérennité d’un conformisme, d’une évidence non démontrée. Les sceptiques diront depuis DESCARTES qu’il faut douter de tout - et nous pouvons y ajouter - en faisant preuve de tolérance limitée vis-à-vis des êtres obtus.

Le conformisme cognitif est un imprinting culturel (comme Conrad LORENZ le démontre avec les oisillons prenant pour leur mère le premier animal à sang chaud qui passe), ce que nous appelons en psychologie sociale la normalisation. Par exemple, un lapin brun dans une collection de lapins blancs albinos est une erreur dans la norme du groupe, alors que c’est bien lui qui représente la normalité de son espèce. Nous ne sommes pas des oies et notre conditionnement est bien plus raffiné et asséné dans nos habitus : il y a la famille qui dit le bien et le mal, puis l’école et la culture et ensuite l’université et la profession.
Sans formation spécifique à l’esprit critique, nous ne sommes plus capables de voir autre chose que la force des tabous qui ont déterminé comme néfastes toutes les idées non conformes. J’admire le peintre namurois Félicien ROPS, au-delà de son œuvre, pour son courage d’avoir vécu toute sa vie avec deux sœurs, donc en marge car cela ne se fait pas chez nous. Nous sommes dans l’idéologie de la monogamie alors que la quasi-totalité du monde animal est polygame et notre conditionnement ethnocentriste nous fera percevoir ce genre de vie comme choquant alors que nous restons indifférents au fait que dans certains pays, plus de 90% des fillettes sont mutilées pour les couper de leur source de plaisir sexuel.
La normalisation se fait souvent de façon répressive ou intimidatrice (du genre « cela ne se fait pas ! »). Attention, cependant nous avons besoin de lois et de contraintes minimales pour vivre ensemble. Aujourd’hui, on vote en Belgique la loi contre le port du TCHADOR que j’applaudis non seulement parce que ce masque est un asservissement des femmes qui doivent être cachées mais pour les dérives que cela peut provoquer. Si la loi ne passait pas, je demanderais à changer la photographie de ma carte d’identité pour celle d’un individu cagoulé inidentifiable et ce serait alors aussi mon droit mais la liberté d’expression ou d’opinion s’arrête là où elle devient une menace pour d’autres (n’en déplaise à ces avocats prostitués qui se réclament des droits de l’homme pour faire échec à cette loi). Par exemple, je suis un terroriste taliban camouflé derrière l’accoutrement d’une femme avec tchador et gants noirs et je peux ainsi tuer avec mes bombes des milliers de civils occidentaux ? Il y a des limites à l’exploitation de la démocratie par les gens des Etats théocratiques qui envahissent nos campagnes et contestent cette loi antiterroriste même s’ils ont acquis la nationalité belge. Ils peuvent bien entendu porter ce camouflage mais alors retourner dans leurs pays d’origine avec les dogmes du djihad.
Je suis un radical d’une gauche non violente et si nous ne sommes pas fermes en tant que collectivité, nous risquons de voir se généraliser les comportements de fous d’extrême droite comme ce norvégien qui, après avoir posé une bombe à Oslo, a tué sur une île proche plus de septante jeunes gens d’un parti travailliste. Nous devons bien sûr aussi balayer devant notre porte et reconnaître dans le temps nos massacres religieux : les cathares, sorcières et autres hérétiques, puis le massacre des protestants et enfin des musulmans lors des croisades, guerres d’invasion au nom du Christ. Comment des hommes se revendiquant de Dieu ont-ils pu faire couler le sang de leurs semblables adorant le même Dieu mais sous un autre nom ?
L’espèce humaine est déroutante, capable de grandes choses mais aussi de tuer son frère de la même espèce, ce que les pires prédateurs ne font pas, et d’inventer des écoles de guerre où l’on apprend à obéir et à torturer ou tuer son semblable. Il n’y a aucune vérité absolue qui justifie la liquidation physique d’un seul homme ou d’une seule femme, par lapidation par exemple.
En « Dynamique des Groupes » (DG), il a été démontré que, si un leader permanent impose ses normes, il va focaliser l’attention de son groupe sur un ennemi extérieur qui deviendra en quelque sorte le bouc émissaire (que l’on peut appeler aussi bien le juif, le palestinien ou la tête de turc). Dès qu’il y a une doctrine normative, il y a une pression à la conformité et ceux qui contestent auront la tête tranchée.
Avec HERACLITE d’Ephèse, nous avons une autre manière de penser qui s’appelle la dialectique et qui consiste à se représenter un point de vue puis l’opinion opposée pour prendre en compte les deux pôles dans un compromis. Cela induit un relâchement de la pression normative et permet à des esprits autonomes de s’exprimer en toute liberté et aux déviances normatives de se structurer pour permettre peut-être un jour un changement social ?
Le pire ennemi de la pensée critique est le fanatisme religieux qui veut imposer ses dogmes ; son principe est enfantin : c’est moi qui possède la vérité et le reste du monde est dans l’erreur. Une culture porte en germe ce qui la ruinera. Le déterminisme mécaniste de notre époque ultralibérale (dite de mondialisation) s’autodétruira de ses propres contradictions peut-être avant que notre espèce ait détruit la terre par son exploitation provoquant le dérèglement climatique. Les blancs, tout particulièrement les américains jouent aux gendarmes du monde au nom de la démocratie (mais la moitié femme de l’humanité y compris en Occident-Atlantique n’a pas les mêmes droits que les hommes) ; ces dernières décennies, avec la CIA, ils ont envahi l’Irak, l’Afghanistan, le Nicaragua, l’île de la Grenade, le Panama, le Vietnam et ils donnent des leçons à l’économie grecque alors qu’eux-mêmes ne sont ni brillants gestionnaires ni aussi cultivés que les grecs.
Je dois pouvoir rencontrer un autre être humain à l’idéologie opposée à la mienne (notons que l’idéologie du changement est toujours une idéologie) sans l’agonir d’injures mais en acceptant de l’écouter et en étant capable de reformuler ses propos sans pour cela m’y soumettre. Notons toutefois qu’il n’y a pas de relation causale directe entre l’activité économique qui domine le monde avec ses conséquences sur les famines en Afrique et la finesse de l’intelligence. Il n’est pas nécessaire d’avoir lu les présocratiques pour exploiter son semblable et affamer ses enfants.
« La connaissance autonome se développe contre la pression sociale, mais de façon sociologiquement conditionnée. La véritable création est individuelle, mais elle ne peut s’opérer que dans des conditions culturelles sinon permissives, du moins non prohibitives. Alors l’auteur, l’écrivain, le penseur sont ceux qui se servent de leur culture pour exprimer, découvrir, élaborer ce qu’il n’y avait pas dans leur culture, et qu’ils introduisent dans leur culture. »[8] Par exemple, en Europe, la majorité des gens sont incroyants et contrôlent les naissances dans leur famille en tolérant les religieux qui eux ne les tolèrent pas ; notre Roi constitutionnel Baudouin faisant partie de la secte du Renouveau charismatique a eu la lâcheté de ne pas abdiquer alors qu’il devait signer la loi sur l’IVG, il a inventé l’impossibilité de régner pour ce jour-là ; pour la même faute grave, un travailleur syndiqué aurait été remercié. Il en va de même aux Etats-Unis où tous ceux qui ne sont pas protestants sont mal vus.
Nous devons affirmer nos idées en les argumentant (et non en criant plus fort) mais toujours en pensant au doute cartésien. « Et si c’était l’autre qui avait raison ? Le vietnamien marxiste envahi qui lutte pour son indépendance d’esprit et de vie ? » pensaient peut-être certains GI’s pendant leur atroce invasion ; autrement dit, il faut se détacher de nos opinions et points de vue pour les analyser de façon critique également. Cela va entraîner un flux vers la positivité. Au lieu de chercher le défaut de la cuirasse chez mon détracteur (malhonnêteté jésuitique), si je recherche dans son discours les points positifs, je deviens plus fort, plus crédible en montrant mon écoute sincère capable de discerner le positif comme le négatif. En gestion des conflits par exemple, c’est en fait l’inviter implicitement à faire de même et chercher à comprendre mon point de vue plutôt que de m’insulter comme un chien qui aboie.

A partir de cette confrontation plus dialectique entre l’institué (les règles, le bétonné, la force brute) et l’instituant (le changement, la créativité, l’égalité), nous pouvons alors déboucher sur l’institutionnalisation (le compromis, l’accord, la création commune). Attention toutefois à ne pas encenser la connaissance scientifique qui peut recouvrir une techno-science d’asservissement. Einstein s’en est mordu les doigts). Je parle d’esprit critique et de dialectique et non d’une néo-vérité de notre époque qui, sous forme d’équation savante, semble neutre mais peut déboucher sur les bombes atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki. HABERMAS, nous invite en toute chose à se poser la question du critère d’émancipation sociale ou non : est-ce que cette découverte scientifique est pour le bien de tous ou pour le profit des plus riches ? Par exemple, les OGM sont un bien pour le profit (le rendement) mais est-ce bien pour la biosphère ? pour la diversité génétique ? ou encore pour l’émancipation du petit paysan pauvre du sud qui achète des semences F1 c’est-à-dire non reproductibles pour la prochaine saison (il faut en racheter des nouvelles, d’où dépendance via Monsantos.
Nous devons combattre les vérités immuables, les superstitions et l’obscurantisme avec la Raison et la sensibilité affective vis-à-vis des injustices sociales de plus en plus cyniques ; par exemple, des camps de réfugiés flambants neufs ont été construits au Kenya pour les somaliens fuyant la famine par OXFAM et les autorités régionales ne veulent pas les ouvrir de peur de voir ces populations s’y installer définitivement ! C’est une question d’honneur et de coresponsabilité entre des hommes égaux mais comme je l’ai déjà dit, il ne suffit pas d’opposer notre utopie de citoyen du monde à l’idéologie dominante du profit, il faut aussi balayer devant notre porte interne en essayant de comprendre puis de domestiquer nos colères irrationnelles, soit un long et infini travail de perfectionnement pour nous faire émerger de la bête impulsive que nous sommes toujours au fond de nous. S’auto-questionner ? Bonjour ma colère d’où viens-tu ? pourquoi es-tu là ? pourquoi l’autre a-t-il pu actionner chez moi mon talon d’Achille représentant – pour moi – un tabou et comment se débarrasser de ce tabou sinon en décidant que je n’en veux plus, ce qui - CQFDd - demande un travail sur soi.
Armer de ces considérations sur l’autocritique, je reviens sur ma relecture du philosophe SCHOPENHAUER et en particulier son ostracisme envers les femmes (comme tous les hommes de Dieu cela dit). Et si au lieu de le qualifier par un quelconque jugement de valeur avec la bannière du féminisme, je m’interroge sur ce qu’il fuit en posant la question basique : est-ce que c’est l’autre humain différent en genre ou la sexualité en général qui le dérange ? Lorsqu’on analyse la forme de ses textes et le choix de certains termes comme « jouissance » (plutôt que plaisir) qui revient beaucoup en confrontant cela avec son portrait de la première page de ces réflexions, on peut dire que ses traits ne sont pas avenants et on pourrait aussi faire l’hypothèse que c’est de l’organisme qu’il se défie ? Il n’a pas le « profil » d’un joyeux drille profitant des plaisirs de l’existence. Dans la citation un peu longue que j’ai fait d’un de ces textes, il dit en substance que l’homme (ayant 5x plus de testostérone) veut obsessionnellement faire l’amour, la femme aussi mais avec d’autres profits en plus, et alors ? Si l’homme et la femme se ressemblaient, la vie serait d’un grand ennui ; par contre, grâce à une tolérance réciproque et une volonté de trouver ensemble des solutions à des fâcheries parfois stupides, nous créons la connivence, l’estime et le respect mutuel.
Le malentendu le plus sournois est dans la venue des enfants , comme si l’amour avait à choisir et non à englober.


Le processus complexe de l’attachement affectif bien décrit par Conrad Lorenz et développé par Boris CYRULNINK[9] (pédopsychiatre) nous explique cette loi de l’interdépendance où la femme moderne émancipée perd patience vis-à-vis de son compagnon qui aurait dû être un prince charmant et le congédie alors qu’un jour les oisillons quitteront le nid et la femelle dévouée se retrouvera alors toute seule, un peu nostalgique peut-être (pas toujours) d’avoir mis son mec à la porte.
Je me répète car je l’ai souvent écrit : ce sont les femmes qui choisissent leur homme et ce sont elles qui le quittent en désamour alors que l’homme n’a rien vu venir car elle sont plus entières, plus vraies, plus sensibles et donc également paradoxalement plus dépendantes de l’attachement, autrement dit ayant plus de travail à faire pour le détachement. Ce sera souvent lorsque les enfants commencent leur adolescence que la femme se déprend de son compagnon à qui elle a trop donné même si lui n’en demandait pas tant. Alors commence un parcours de la combattante qui a perdu le charme de ses vingt ans ; la beauté est un leurre qui a gangrené aussi notre esprit critique : pourquoi choisir un playboy bien désodorisé et qui fait de la musculation ou une nana qui mange des Kelloggs en robe rouge avec des lolos surdimensionnés ? Et non une autre âme qui complète la nôtre ?
Ne pourrions-nous pas envisager un compromis de vie qui respecte les différences et besoins de chacun, par exemple où l’on dépasserait cette norme que ce sont les hommes qui draguent et les femmes qui attendent tout en prenant des distances avec les scénarii répétitifs de vie quotidienne parfois lassants et qui agacent l’un comme l’autre des partenaires (là aussi avec les normes formatées en nous : pour caricaturiser les hommes adorent les poussières et les femmes la propreté) et à la place se voir tel qu’on est, se rencontrer pour se parler avec respect sans velléité de contrôler la vie de l’autre (petit exemple de détail : les hommes sont fiers de piser debout et certaines femmes les poussent à s’asseoir sur la cuvette puis les méprisent de leur abdication.)

Imaginons un autre programme que boulot-métro-TV-dodo, Monsieur invite Madame au restaurant avec des vins délicieux, le couple parle beaucoup (un effort particulier est demandé aux hommes) et ils vont faire l’amour pour se faire l’un l’autre « avoir bon », chacun sachant qu’il ne s’agit que d’une secousse animale agréable, nécessaire mais non suffisante, l’essentiel étant dans la communication entre les genres (le don des corps étant dans un plaisir partagé d’enfants et non une finalité détournée par les religieux). Cela sous-entend un détachement de nos formatages à l’eau de rose à propos des princes charmants (qui dans la réalité ont du bide et des rides) et des princesses qui défèquent comme toutes les autres entités animales. « Dans » et par le détachement de nos illusions, nous dépassons Wilhelm REICH ainsi que ce casse-couille d’Arthur pour réinventer un amour sans possession, la voie du milieu du Bouddha et de l’anarchiste PROUDHON qui ne pourrait plus dire « la propriété c’est le vol » car les humains seront autonomes et libres et gestionnaires de leur propre corps provisoire.
« Tant que nous n’aurons pas progressé dans ces relations, nous demeurerons dans l’ère des barbares (doctrines, idéologies, théories réductrices et mutilantes), qui est en même temps l’ère de la barbarie dans nos relations avec la noosphère (possession aveugle par l’idée) et l’ère de la préhistoire de l’esprit humain (sous-développement de ses potentialités complexes).(…)Le sous-développement n’est pas seulement celui des esprits voués aux illusions mythologiques, aux croyances superstitieuses, et aux grossièretés idéologiques. C’est aussi l’esprit de la techno-science hyperspécialisé, unidimensionnel et abstrait, voué aux théories réductrices et obéissant aux paradigmes mutilants ; l’abstraction colonise notre monde, et il est nécessaire de coloniser les abstractions qui nous colonisent. »[10]
Je réfléchis ici pour ma propre société occidentale-Atlantique mais je sais que si mes amis africains choisissaient aussi le risque de l’émancipation de leurs femmes (avec une instruction similaire aux hommes, non mutilées dans leur chair et non contraintes par des normes d’habillement), ils y gagneraient en complicité d’égaux en pouvant ainsi échanger avec les humains de l’autre genre de façon plus joyeuse et rieuse car elles seraient alors leurs amies et non leurs propriétés.
Jean-Marie LANGE, formateur GAP, 31.07.2011



[1] Sources : SCHOPENHAUER A., Le monde comme volonté et comme représentation, Paris, PUF, 2003.
SCHOPENHAUER A., Le Fondement de la morale, Paris, Livre de Poche, 2007.
SCHOPENHAUER A., La philosophie universitaire, Paris, Mille et une nuits, 2006.
SCHOPENHAUER A., Parerga & Paralipomena, Petits écrits philosophiques, Paris, Coda, 2010.
SCHOPENHAUER A. Schopenhauer dans tous ses états. Une anthologie inédite par RAYMOND D. et PAJAK F., Paris, Gallimard, 2009.
[2] SPINOZA Benoît, Traité de l’amendement intellectuel, Paris, Allia, 2009, p.63.
[3] Notons qu’ à l’instar de Jean-Jacques ROUSSEAU qui a écrit « L’Emile » (magnifique éloge de la pédagogie) et a placé ses enfants à l’assistance publique, Schopenhauer est un philosophe qui aide à vivre mais qui fut un misogyne hors pair : par exemple au restaurant, il mangeait seul et réservait la place lui faisant face pour qu’elle reste vide, de peur qu’une femme lui propose sa compagnie.
[4] Schopenhauer, Parerga &, ibid., p. 269.
[5] Schopenhauer, Parerga &, ibid., p.296-297.
[6] Spinoza Benoît, L’éthique, Monaco, Du Rocher, 11974, p.240.
[7] LABORIT Henri, Comme l’eau qui jaillit, Liège, Noms de Dieux, 2000, Alice, p.74.
[8] MORIN Edgar, La méthode tome IV, Les idées, Paris, Le Seuil, 1991, p.48.
[9] CYRULNIK B., Les nourritures affectives, Paris, Odile Jacob, 2.000.
CYRULNIK B. Sous le signe du lien, Paris, Hachette,2003.
CYRULNIK B. L'ensorcellement du monde, Paris, Odile JACOB, 2001.
CYRULNIK B. Un merveilleux malheur, Paris, Odile JACOB, 2002.
CYRULNIK B. Parler d'amour au bord du gouffre, Paris, Odile JACOB,2004.
CYRULNIK B., Les vilains petits canards, Paris, Odile JACOB, 2004.
CYRULNIK B., De chair et d'âme, Odile JACOB, 2006.
CYRULNIK B., La naissance du sens, Paris, Hachette, 2006.
CYRULNIK Boris, Autobiographie d'un épouvantail, Paris, Odile JACOB, 2008.
CYRULNIK B., Je me souviens, Paris, L'Esprit du temps, 2009.


[10] Morin E., Les idées, ibid., p.246.

mardi 19 juillet 2011

Les relations Nord-Sud et les famines

Association pour le développement de l’autonomie et de la participation sociale

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Les relations NORD-SUD et la mainmise économique des Occidentaux-Atlantique sur le SUD

« (Que faire) pour enrayer l’épouvantable génocide entrepris dès janvier 2003 par le dictateur du Soudan, le général Omar Bachir, dans les massifs montagneux et les savanes du Darfour. Les hommes, femmes et enfants Massalit, Four, et Zaghawa tombent par milliers sous les bombardements des avions Antonov et les coups de lance des milices équestres arabes, les Janjaweeds. Tels les cavaliers de l’Apocalypse, ces tueurs s’abattent sur les villages africains, violant, mutilant, égorgeant femmes et jeunes filles, jetant les enfants vivants dans les brasiers des cases en feu, égorgeant les hommes, adolescents et vieillards. Les Janjaweeds tuent sur ordre des généraux au pouvoir à Khartoum, eux-mêmes téléguidés par les « penseurs » du Front islamique du salut. Nous étions le mardi 20 mars 2007. »[1] Et que font les casques bleus des forces internationales des Nations Unies depuis leur inertie au Congo en 1960 ou au Rwanda en 1994 ? C’est vrai, la Russie a un droit de veto à l’ONU ; c’est pourquoi, on massacre sans réaction en Syrie alors que l’Otan intervient en Lybie ?

Le capitalisme s’est transformé en ultralibéralisme mondial (globalisation) de plus en plus inhumain. Les structures industrielles sont devenues des projections spéculatives informelles. La faim augmente dans les pays de sécheresse d’Afrique et les statistiques disent que nous sommes 6,5 milliards d’humains mais que nous pourrions en nourrir sans problème 12 milliards avec une ration convenable de 2700 calories/Hj. Mais alors, il faut arrêter les cultures massives de soja au Mato Grosso (Brésil) pour l’alimentation animale ou le bioéthanol et arrêter le scandale de Monsanto et de ses semences OGM non reproductibles par les paysans pauvres ?

« La misère est le terreau du terrorisme groupusculaire, l’humiliation, la misère, l’angoisse du lendemain favorisant grandement l’action des kamikazes. Une fraction des sommes investies dans la « guerre mondiale contre le terrorisme » suffirait d’ailleurs pour éradiquer les pires fléaux qui affligent les populations laissées pour compte sur la planète. Dans son rapport annuel de 2006, le programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) estime ainsi qu’une dépense annuelle de 85 milliards de dollars sur une période de dix ans permettrait de garantir à tout être humain l’accès à l’éducation de base, aux soins de santé de base, à une nourriture adéquate, à l’eau potable et à des infrastructures sanitaires, ainsi que pour les femmes, l’accès aux soins de gynécologie et d’obstétrique. »[2]

En 2001, le secrétaire général de l’ONU, KOFI ANNAM et Mary ROBINSON, haut commissaire aux droits de l’homme convoquent du 28 août au 2 septembre en Afrique du sud, la conférence de DURBAN contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée. Rappelons le lien symbolique de Nelson MANDELA qui en 1994 met fin à la politique raciste de l’APARTHEID : le vieux lion avait lancé le slogan « SEKUNJALO ! » (le moment est venu). Or, DURBAN fut une méga catastrophe[3] car tant la partie de conférence des mouvements sociaux que celle des Chefs d’Etat se retournèrent en leur contraire. Rappelons qu’il n’y a qu’une seule race humaine Homo Sapiens Sapiens (et des ethnies) avec des qualités et des défauts et qu’historiquement, il a fallu des décennies avant que la haine du nazisme ne s’estompe dans l’Occident. L’erreur de cette conférence était de penser que seuls les blancs pouvaient être racistes alors que les nord-africains le sont depuis bien plus longtemps et ont inventé l’esclavage. Ils sont toujours aujourd’hui dans la haine et ont besoin d’un bouc émissaire (car ils n’étaient pas capables de penser, au-delà du commerce d’ébène, à s’implanter en Afrique noire dans un autre type d’activité économique).

La finalité de cette volonté de changement humaniste contre les racismes se mua en son contraire : la haine des occidentaux (boucs-émissaires). A DURBAN, l’émotionnel de l’institution imaginaire de la société (CASTORIADIS) fusa dans la haine du matin au soir avec de part et d’autre insultes et reproches. Les représentants des EU quittèrent DURBAN au bout de 48 h. Les délégués des autres pays quittaient la salle en claquant la porte, dans une ambiance d’hystérie collective, revenaient, vociféraient et repartaient. Haïti notamment exigeait de la France le remboursement de 150 millions de francs-or, c’était avant le cataclysme du tremblement de terre et l’aide si mal structurée de la part des américains. MANDELA joua les médiateurs pour empêcher les délégués européens de partir, en vain, un vrai gâchis de débordement de haine car les séances n’étaient pas animées ni structurées de façon rationnelle (avec ordre du jour et animateurs professionnels, coupeurs de micro au besoin). Caroline FOUREST témoigne : « Je suis arrivée en rêvant d’y trouver des forces progressistes qui permettraient de construire un monde plus juste au XXI° siècle. Et je suis tombée nez à nez avec des fanatiques voulant nous ramener au Moyen Age. Plus exactement aux années trente (…). Le forum des ONG de DURBAN s’est révélé être un vrai foyer d’agitation antisémite et pro-islamiste. »[4] Il y avait, dit-elle, quatre forces en présence : la CIA de George BUSH, les intégristes de Ben Laden, la gauche altermondialiste et tiers-mondiste et les militants des droits de l’homme. Derrière BUSH, l’ultralibéralisme avec la droite religieuse américaine et les industriels du pétrole et derrière feu Ben Laden les islamistes fanatiques qui ne s’inquiètent nullement des déshérités qu’ils font souffrir au Moyen-Orient.

« Les mouvements islamistes font-ils rêver les peuples ? Evidemment non. Qu’ont-ils à proposer ? La charia, les mains coupées des voleurs, la lapidation des épouses soupçonnées d’adultère, la réduction des femmes au statut d’êtres infrahumains, le refus de la démocratie, la régression intellectuelle, sociale, spirituelle la plus abominable. »[5]

Les mouvements progressistes eux aussi étaient en guerre larvée, les uns soutenant les droits de l’homme et l’option des démocraties laïques, les autres, les tiers-mondistes plus communistes « attardés » compréhensifs de l’intégrisme. Caroline et son groupe prenaient mille précautions pour distinguer ISLAM religion et ISLAMISME (intégrisme) comme ils l’avaient fait auparavant pour le christianisme et sa tentation intégriste sectaire. Rien n’y a fait, on leur a collé l’étiquette « islamophobie » par la grâce du prédicateur à la langue fourchue Tariq RAMADAN qui propose de remplacer les droits de l’homme par les droits de l’islam pour tous, donc une incompatibilité avec les non-croyants majoritaires d’Occident.

FOUREST est soutenue également par l’essai de Pascal BRUCKNER[6] qui démonte le manichéisme de certains tiers-mondistes qui rend l’Occident coupable de tout (y compris des attentats sanglants commis en Europe par les islamistes). Les populations colonisées utilisaient l’esclavage bien avant l’homme blanc (les Bella des Touaregs), étaient et sont toujours englués dans l’obscurantisme (archaïsme, tribalisme, népotisme, sexisme, fanatisme, tortures, mutilations sexuelles,…) à qui l’on pardonne tout. Le coupable n’est pas non plus l’Occident mais les spéculateurs ultralibéraux qui font des profits monstrueux. Après la crise des banques remboursées par l’épargne des petites gens, l’Europe ne va pas beaucoup mieux que l’Afrique et la Grèce est à la veille d’une insurrection (comme les révolutions du monde arabe).

La gauche instituée de centre droite est molle, et pour ne pas les froisser, dit oui à toutes les propositions des migrants qui colonisent nos structures et font des règlements pour les musulmans et non pour tous. Or tous les hommes sont en principe égaux devant la loi ? Il existe encore une autre gauche qui perçoit l’islamisme comme un danger totalitaire, une intrusion offensive contre nos valeurs les plus sacrées : les droits de l’homme et de la femme, les libertés, la laïcité, la démocratie, etc.,…et appelle donc à l’esprit de résistance non-violent. Bien sûr, on peut être à la fois antifasciste (anti-islamique) et anticolonialiste, il est même conseillé d’être les deux et de développer en Afrique des projets pour l’autonomie villageoise. Mais nous n’avons rien à faire d’être pro-israéliens ou pro-palestiniens, ni pour Sahal ni pour le Hamas. Pacifistes, nous voulons la paix dans le monde, donc la reconcentration des luttes contre les capitalismes, y compris des dictateurs africains qui s’enrichissent de l’aide internationale au lieu de la redistribuer aux « nécessiteux ».

Le cœur de ce nouveau combat est la haine rétrospective (l’ennemi ou bouc émissaire). Dans notre pays, la Belgique, l’ethnie flamande déteste les wallons francophones parce que sa bourgeoisie parlait français. De même, nos parents détestaient les allemands parce qu’ils avaient souffert de l’occupation des nazis et de leurs camps d’extermination des juifs, des handicapés, des francs-maçons, des communistes,…Pourtant, à présent, nous sommes en paix avec les allemands car les fils ne sont pas responsables des crimes de leurs pères. Et il semblerait que ce phénomène de pardon ne fonctionne pas en Afrique, là où le marasme économique a besoin de boucs émissaires : les Occidentaux-Atlantique. 30% de Bruxelles est colonisé par les marocains dans le ghetto voulu des alentours de la gare du midi. Un de mes amis dont la fille a épousé un jeune musulman rend avec son épouse une visite de courtoisie au jeune couple, porteur, selon nos coutumes, d’une bonne bouteille de vin. Le gendre intégriste fait l’affront à l’invité (le père) le priant, la prochaine fois, d’ apporter aussi le tire-bouchon car lui, pur parmi les purs, ne veut pas se salir avec cela. Une offense similaire dans le monde musulman en inversant les rôles est une atteinte à l’honneur du vieux qui devrait tuer le jeune gendre pour laver cet affront. Notons que si la liberté de pensée et d’expression est sacrée chez nous, l’honneur chez eux est au-dessus de tout.

Les manques de respect se généralisent en Europe du fait de la seule communauté immigrée (marocaine, albanaise, turque, tchétchène, bosniaque, afghane, pakistanaise,…) qui, même face à un employeur potentiel, est arrogante et s’étonne du racisme réactif des belges. Il y a un amalgame malsain entre la majorité des croyants musulmans qui sont mes amis au Mali (comme pourrait-on être malien sans être musulman ?) et ces petits jeunes haineux islamistes, ayant raté toutes leurs formations, qui ne respectent ni nous anciens, ni nos morts (profanation des cimetières). C’est pour cela que le racisme réactionnel occidental apparaît et sert bien sûr les intérêts des mouvements d’extrême-droite autant que les spéculateurs ultralibéraux. DURBAN[7] fut un acmé de cette rencontre entre les haines. Notons que cette montée malsaine de l’incompréhension est encore légère comparée à la haine entre les hindous et les musulmans pakistanais. Par exemple, j’attends un avion au milieu de la nuit à Bamako et je me lève de mon siège pour jeter un papier dans une poubelle (réflexe idiot car les papiers sont tous par terre) ; une mama se précipite pour prendre ma place, mon copain bloque le siège et lui disant que c’est la place du petit vieux éloigné d’un mètre et elle lui répond ulcérée « Je suis ici chez moi, pas toi ! ». Je réfléchis aux conséquences de la même phrase prononcée par moi à Bruxelles à la gare du midi : cela générera une émeute peut-être ; en tout cas, je n’y suis pas chez moi !

Cela étant posé, identifions les vrais loups : le 20 octobre 2008 à l’Elysée, le 15 chefs d’Etats de la zone euros libéraient 1700 milliards d’euros pour renflouer leurs banques touchées par la fameuse crise américaine. Dans les mois qui ont suivi, les plus petits salaires et les retraites furent rabotés ainsi que les crédits destinés aux pays les plus pauvres.

La conséquence en est que plusieurs centaines de millions de personnes - en plus - ont été jetées dans l’extrême pauvreté et la faim endémique. « Entre 1972 et 2002, le nombre des hommes, des femmes et des enfants gravement et en permanence sous-alimentés en Afrique a augmenté de quatre-vingt à plus de 200 millions de personnes. Or l’une des principales causes de ce désastre est la politique de dumping agricole pratiquée par les Etats occidentaux.. Ceux-ci versent, en effet, à leurs propres paysans chaque année des milliards de dollars au titre de l’aide à la production et à l’exportation. »[8] C’est cela qui augmente la haine identitaire et le repli tribaliste en détruisant les mouvements d’émancipation. Comment désarmer la haine du sud ? Comment construire une société juste, respectueuse du droit à la vie de chacun. L’action du 11 septembre 2001 et les mouvements dont elle est issue sont l’exact contraire de ce qu’enseigne le Coran : « Ces mouvements qui prétendent s’inspirer du Coran pratiquent l’exact contraire de ce qu’enseigne le Coran. Cette pathologie est, certes, issue d’une souffrance profonde. Celle-ci fragilise les individus, surtout les jeunes. Elle les expose aux tentations, aux manipulations et autres embrigadements dont l’analyse reste à faire. La haine raisonnée est issue de la même souffrance..(…) La mémoire blessée des peuples autrefois colonisés est devenue aujourd’hui une force historique puissante. Mais pourquoi ces revendications de justice réparatrice, de repentance adressées par le Sud à l’Occident ne surgissent-elles qu’aujourd’hui, soit plus d’un siècle après l’abolition de la traite et cinquante ans après la fin de l’occupation coloniale ? »[9]

Hier, 14.07.2011, forcé par l’ONU, la Belgique a donné 4 millions d’euros pour la famine qui commence en Somalie (plus de pluie depuis 3 ans) au Kenya et en Ethiopie.
« Ce n’est pas nouveau, pour prendre la référence de 2007, cette année là, trente-six millions de personnes sont mortes de la faim ou de ses suites immédiates (les maladies liées à la sous-alimentation, kwashiorkors, anémie, etc.) Dans l’hémisphère sud, les épidémies, la faim, l’eau polluée et les guerres civiles dues à la misère détruisent chaque année presque autant d’êtres humains que la seconde guerre mondiale en six ans. »[10] Notons qu’il y a quelques jours, lors de la rencontre des financiers de l’Europe pour sauver la Grèce des spéculations, une des mesures proposées par la Belgique fut de réduire son aide aux pays perpétuellement en voie de développement qui sont majoritairement en Afrique. Lors des jeux olympiques de Pékin, le Premier Ministre belge Yves Leterme a donné à cet Etat nucléaire 600.000 euros pour l’aider à faire face à ses dépenses (un glissement terrain ou une participation aux frais du nouveau stade en forme de nid ?). Par rapport à ce récent déblocage de 4 millions d’euros comme contribution pour lutter contre la famine de l’Afrique de l’est, beaucoup de gens, comme moi, auraient préféré que l’on consacre 4,6 millions pour les famines et rien pour la Chine !

Le banditisme bancaire a créé des millions de chômeurs dans ce que l’on appelle l’Occident-Atlantique (Europe et Etats-Unis) mais l’équivalent dans le sud, ce sera plusieurs centaines de millions de personnes confrontées à l’extrême pauvreté et à la faim.

A l’époque de la guerre de la Grande Bretagne contre le Chili pour la suprématie dans les îles Malouines et sous la responsabilité de Madame TATCHER et de son allié US Ronald REAGAN, des missiles TOMAWACKS furent tirés par la Royal Navy sur les « malouins ». Faisons une hypothèse, celle de la conversion du coût de dix missiles anglais et donnons, sous contrôle d’investissement, cette somme au Mali, ce serait alors BOUSTER son économie et peut-être lui permettre à terme une autonomie structurelle ?

Lors des colonisations, pour s’accaparer les richesses minières et agricoles du sud, le général GALLIENI de 1880 à 1895 combattît la résistance du malien Samory TOURE et de nombreux chefs autochtones. (C’est le même général qui assujettit l’île de Madagascar).
Et aujourd’hui, cela continue sous la forme économique, l’Europe exige le libéralisme tout en versant des milliards aux agriculteurs européens pour l’aide à la production et à l’exportation et parallèlement, elle pratique la politique du dumping agricole vis-à-vis des pays africains.
Soyons clair, le dumping occidental a détruit l’agriculture vivrière en Afrique et au sein du conseil général de l’OMC à Genève, le Président Nicolas SARKOSY continue, en 2011, ce dumping avec en plus un veto à la délivrance de visas touristiques pour les pays du Sahel car deux otages ont été tués au Niger ?

« MALI Dernière Minute
Dernière mise à jour : 30 juin 2011.
Des opérations militaires sont en cours dans la zone s’étendant au nord d’un axe Mourdiah/Sokolo/Niafounke/Tombouctou. Cette région se trouve dans la zone rouge, où tout déplacement est formellement déconseillé. Il est donc à nouveau recommandé qu’aucun Français, pour quelque raison que ce soit, ne se rende dans cette zone.
Dans le contexte actuel d’insécurité dans la zone sahélo-saharienne, les intérêts français au Mali sont directement visés par des menaces certaines. Les ressortissants français en particulier sont l’objet sur l’ensemble de la zone d’un risque d’enlèvement très élevé, qu’ils soient résidents ou de passage.
Sécurité : Appel à la responsabilité de chaque Français se trouvant au Mali.
La carte du Mali est partagée en deux zones : une zone rouge et une zone orange.
· La zone signalée en rouge
Les autorités françaises déconseillent formellement tout déplacement dans la zone située au nord d’une ligne Gogui - Nioro - Nara - Nampala - Lere - Niafunke - Fleuve Niger jusqu’à la frontière avec le Niger, y compris les villes de Tombouctou, Gao et Ouatagouna (ces villes étant incluses dans la zone rouge). Il est également formellement déconseillé de circuler entre le Mali et l’Algérie par la route. Les Français qui se trouveraient en ce moment dans ces zones, qu’ils y soient résidents ou de passage, sont instamment invités à prendre contact avec l’Ambassade (bamako-fslt.admin-francais@diplomatie.gouv.fr) et de les quitter au plus vite.
· La zone signalée en orange
La province hors Bamako : Les autorités françaises y déconseillent tout déplacement, sauf motif impérieux, notamment d’ordre professionnel, et après avoir informé l’Ambassade de France à Bamako (bamako-fslt.admin-francais@diplomatie.gouv.fr). Cette zone est située au sud de la ligne Gogui - Nioro - Nara - Nampala - Lere - Niafunke - Fleuve Niger (cf. la carte dans la rubrique « Sécurité »).
Il conviendra en tout état de cause de se déplacer en convoi et de veiller à ce que les autorités locales (gouverneurs de région et préfets de cercle) en soient informées.
Situation particulière de Bamako
A ce jour, compte tenu de la forte sensibilisation des autorités locales aux questions sécuritaires, les risques liés à un attentat ou à un enlèvement, s’ils ne doivent pas être minimisés, ne sont pas de la même importance dans la ville de Bamako. Il convient néanmoins de respecter pleinement les précautions exposées infra. » (Extrait de la note conseil de l’Ambassade de France).

En conclusion

Rien n’est simple et rien ne doit être réducteur à part cet ennemi dangereux et peu visible de la spéculation internationale où par exemple, un Etat comme la Lybie achète des centaines d’ Ha de terre arable au Mali sans référendum auprès de la population locale, ce qui veut dire que ce morceau de territoire va être transformé en monoculture d’exportation pour la Lybie et tant pis pour les villages compris dans le bloc, achetés avec leurs traditions et leurs cimetières ?

Depuis 500 ans, les Occidentaux dominent la planète avec leurs technologies et leurs armements. En 1492, l’Amérique est découverte et il s’ensuivra le massacre systématique des indiens puis la déportation massive des esclaves noirs vers les Antilles et le Brésil, là où les indiens avaient été massacrés. Enfin vinrent le temps des colonisations avec l’exploitation éhontée des ressources naturelles et la destruction des cultures spécifiques et à présent, le règne des organismes de contrôle pseudo-rationnel comme l’OMC et le FMI pour permettre la libre concurrence entre le petit cultivateur malien équipé de sa houe et le gros agriculteur européen avec sa charrue dix socs et les subsides européens. Le monde est trop injuste.

Le monde survivra-t-il , en particulier le continent africain, si nous laissons faire les militaires, les spéculateurs et autres gens sans conscience alors que nous, personnes de bonne volonté sommes la majorité ?

Dans une classe de cours, il suffit de 10% de profs pour mettre en échec un étudiant, et la majorité ?

Dans l’Etat belge sans gouvernement depuis plus d’un an - car bloqué par deux partis nationalistes flamingants (CD&V et NV-A) -, il manque un député (sur 99) pour créer une majorité des deux tiers pour s’occuper des réformes de structure demandées par les partis nationalistes alors que la Wallonie, Bruxelles et une moitié de la Flandre ne demandent rien, juste un gouvernement par la majorité des 7 autres partis pour éviter la scission du pays ?

Dans notre monde à la pensée unique économique, il suffit de 5% de spéculateurs pour déséquilibrer les économies des Etats pour leur profit ; où est la majorité démocratique ?
Face au dérèglement climatique, la conférence de Stockholm était le dernier espoir pour ratifier les accords de Kyoto sur la pollution ; deux seuls Etats s’y sont opposés : la Chine et les Etats-Unis d’Obama ; quid de tous les autres peuples du monde ?

Pour conclure sur une note optimiste, les humains perdent certes leur citoyenneté démocratique au profit de la globalisation de l’ultralibéralisme mais progressent sur le plan psychologique interpersonnel. En effet, en comparant les rapports éducatifs sur trois générations, on peut dire que dans les années 1950, c’était dur pour les enfants (trop nombreux dans une seule famille, non éduqués et élevés avec trop de sévérité) ; dans les années 1975, c’était plutôt cool avec des parents à l’écoute (dans l’après 1968) et dans les années 2000, le projet de bien élever ses enfants en leur donnant une bonne instruction est un objectif majeur de tous les parents du monde. C’est pourquoi par exemple le contrôle des naissances progresse partout, il vaut mieux avoir 3 à 5 enfants assumés plutôt qu’une pléthore qu’on ne sait plus nourrir. Avant, c’était « les coutumes » , elles sont aujourd’hui dépassées.

Nous sommes des frères et sœurs de l’espèce humaine et notre association (Groupe d’Autoformation Psychosociale – GAP) va au Mali pour aider des écoles mixtes à s’équiper et à s’autogérer avec un peu de confort, celui de l’ombrage par exemple. L’objectif pour lequel nous nous faisons insulter parfois est de ne pas céder à la pression. Nous allons donc planter de 2011 à 2012 près de 2000 arbres donnant des fruits, des condiments, de l’ombrage, de l’humus et générer ainsi nous l’espérons, un miro-climat. A Sévaré, au Mali, je me sens chez moi car mes frères musulmans m’accueillent pour partager nos projets que nous, nous appelons fraternité et autonomie et qui, dans Le Coran, s’appellent « charité envers les plus pauvres ».

Jean-Marie LANGE, 15.07.2011

[1] ZIEGLER Jean, La haine de l’Occident, Paris, Livre de Poche, 2010, p.26.
[2] ZIEGLER Jean, L’empire de la honte, Paris, Livre de Poche, 2008, p.63
[3] « LEVI-STRAUSS Claude, dans son discours devant l’UNESCO en 1971 définit ainsi le racisme : « Une doctrine qui prétend voir dans les caractères intellectuels et moraux attribués à un ensemble d’individus, de quelque façon qu’on le définisse, l’effet nécessaire d’un commun patrimoine. » Le racisme selon cette définition est l’essence même du colonialisme. IL exclut par avance toute relation de réciprocité et de complémentarité avec le colon. Mais le racisme ne détruit pas que le colonisé. Il ravage aussi le colon. Emmanuel KANT dit : L’inhumanité infligée à un autre détruit l’humanité en moi. » in ZIEGLER, La haine, ibid. p.77.
[4] FOUREST Caroline, La tentation obscurantiste, Paris, Poche, 2009, p.18.
[5] ZIEGLER, la honte, ibid., p.87.
[6] BRUCKHNER P., Les sanglots de l’homme blanc, Paris, Seuil, 1983.
[7] Notons que pour la petite histoire, j’étais mandaté par l’ISO, institut mondial de sociologie de Madrid, via l’université de Jussieu de Paris 7 (et le prof Vincent de Gaulejac) pour participer à ces rencontres. J’avais selon les normes du mode tayloriste de mon employeur , l’enseignement de la province de Liège, introduit par la voie hiérarchique ma demande deux ans auparavant , je n’eus pas l’autorisation (alors que c’était les vacances) et deux ans après, on me réclama un rapport sur mon activité non autorisée à DURBAN ; la bureaucratie est un autre problème que nous évoquerons ailleurs.
[8] ZIEGLER, La haine, ibid., p.108.
[9] ZIEGLER, La haine, ibid., p.45/46.
[10] ZIEGLER, La haine, ibid. p.333/334.