samedi 2 mars 2013


CAPI – Cahiers d'Autoformation Psychosociale en Pédagogie institutionnelle N°44 ORWELL et le respect des travailleurs

ORWELL, le travailleur et le devenir démocratique

            « La démocratie dépend des conditions qui dépendent de son exercice réel. D’où sa fragilité. Ainsi on voit la difficulté d’instaurer la démocratie après l’expérience totalitaire. La règle du jeu démocratique a besoin d’une culture politique et civique que les décennies de totalitarisme ont empêché de se former ; la crise économique » suscite un excès de conflictualité qui risque de briser la règle démocratique, tandis que les exaspérations nationalises favorisent la dictature d’une majorité exaltée contre les minorités pacifiques. » l[1]

            Le monde n’est ni blanc ni noir, il est dialectique c’est-à-dire à la fois blanc et noir, bon et mauvais. Seuls les religieux se donnent des dogmes à partir desquels ils rejetaient auparavant les luttes ouvrières et l’émancipation par l’école laïque, neutre et gratuite pour tous en lieu et place de leurs enseignements élitistes, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, je pense notamment à Don Bosco.

            Les croyants en l’argent de notre époque sont les mêmes du point de vue dogmatique, ils croient au PROGRES économique même si de plus en plus d’enfants meurent de faim dans le tiers-monde et si les riches occidentaux deviennent de plus en plus riches. La pensée est une activité cérébrale vide (on peut penser à ses courses et au chat par exemple) s’il n’y a pas de lectures, de débats contradictoires et de méditation qui nous invitent à la réflexion par la RAISON. Attention toutefois, la raison peut aussi devenir un dogme nostalgique et/ou barbare que nous voulons imposer aux peuples moins technocratiques ou une pseudo-raison comme la « dissonance cognitive » de Léo FESTINGER qui est en fait un accommodement de notre cerveau a posteriori dans le genre « j’ai bien fait d’acheter cela ! ».

            Le premier moteur psychosocial de la rigidité et de la haine du passé (pour certains, de notre propre enfance ?) a mené aux guerres civiles de religion au XVI° et au XVII° siècles en France. Il faudrait nuancer les préjugés, jugements de valeur et stéréotypes, les coutumes absurdes et sanglantes (comme l’excision) et les superstitions qui obscurcissent la joie de vie avec une histoire plus objective car plus dialectique. Les enfants travaillant à 12 ans au fond des mines de charbon, cela a existé (pour que la famille puisse survivre) tout comme « le plus jamais cela ! » des dérives fascistes et génocidaires.
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[1]  MORIN Edgar, Ma gauche, Paris, François Bourin, 2010, p107. Par exemple, faire mention des années 1930 dans le discours de Nouvel an du Roi déplaît au séparatistes N-VA du Bourgmestre d’Anvers et au Vlaams Belang fasciste dont le slogan est « que crève la Belgique ».
 

            Nous avons connu ces horribles massacres entre frères humains au XX siècle, avec Hitler et Staline et Pol pot et Franco et Kagamé l’actuel chef du Rwanda s’accaparant le Kivu congolais. Face à ce passé d’un gouffre obsessionnel insupportable(un choc postraumatique collectif), nous avons créé en Wallonie « Les territoires de la mémoire » pour ne jamais oublier cette bestialité. Mais cependant, ce n’est pas en soi une certitude de PROGRES pour le présent, surtout depuis la crise de 2008. Avec l’austérité, des retraités grecs doivent vivre avec 400 €/mois (logement, chauffage, vêtements, nourriture et médicaments).

            La réflexion caricaturale est que les communistes ont perdu avec leurs goulags et que les américains ont gagné avec le plan Marshall et maintenant, il n’existe plus qu’un capitalisme sans garde-fou pour la planète (américain et chinois) qui est le vainqueur du monde de la globalisation ultralibérale de Big Brother. Les travailleurs souffrent de plus en plus d’épuisement, de burn-out ou se suicident sur les lieux du travail parce que la recherche du bien-être pour tous a disparu au PROFIT du rendement maximal pour les spéculateurs.

            Pour nous, humanistes, la civilisation est devenue un cauchemar car on n’évalue plus les travailleurs, y compris ceux du secteur non marchant, sur leur implication, mais sur les produits, le rendement. On les rabaisse au rôle d’outils et on modifie leurs contrats sans même prendre la peine de leur expliquer le pourquoi.

            Dans ma carrière d’enseignant, j’ai été détaché pédagogique pour animer (aujourd’hui diriger) une association sociale, la CSCJ (Confédération du Service Civil de la Jeunesse) à Ixelles (les objecteurs de conscience) et cela se passait très bien avec un CA responsable qui envoyait deux fois par an une petite délégation pour prendre le pouls des travailleurs comme moi-même, je me rendais 2X/an au CA pour présenter mes comptes et l’avancement des projets décidés en AG. Puis, j’ai une nouvelle fois quitté mes classes de Haute Ecole pour représenter la CPEONS à Bruxelles au Conseil de l’Education et de la Formation (CEF). J’instruisais des dossiers autant pour la chambre de l’enseignement que pour la chambre de la formation. Après deux ans, j’ai eu la nostalgie de mes classes. Bien que mes collègues étaient très corrects, il y avait des scissions non dites : d’une part, celle entre l’enseignement officiel et subventionné que je représentais et  l’enseignement catholique libre financé à même hauteur que l’officiel et d’autre part, le hiatus entre les décisions de ministres désignés par baguette magique pour être responsables d’une matière qu’ils ne connaissaient pas toujours et les souhaits des experts pédagogiques universitaires. Un politicien m’a dit un jour tout de go que « l’enseignement était un trop gros fromage pour écouter les besoins des enseignants ».

Ma dernière expérience dans le social, fut de me retrouver dans un CA de type « Ligue des familles » comme administrateur « de paille » (comme les autres) hormis 3 dirigeants « masqués » : pas de projet, juste de la gestion dans un salmigondis invraisemblable où les vrais chefs se revendiquent d’être un PO taylorisme (de droite pour ce que j’en ai traduit à l’université) et à la fois syndicalistes ?! Avec un autre collègue nous avons voulu rencontrer les travailleuses et leurs besoins : la terreur régnait, les cahiers de rapport étaient agrafés pour que l’on n’y découvre rien et un climat noir de harcèlement moral fut la conclusion/rapport de notre équipe de psychologues au CA. Nous avons alors subi une catharsis très émotionnelle des autres administrateurs (des jugements de valeur, des jugements d’autorité et de stéréotypes patronaux mais aucune question). J’ai remis ma démission pour incompatibilité avec mes valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité (comment peut-on se déclarer de gauche et pratiquer le taylorisme ?), j’ai reçu trois nouveaux jugements de valeur (je ne réponds jamais au « justifiez-vous des gens de pouvoir)mais personne ne m’a demandé de développer les raisons de mon départ ! J’ai quand même distribué un petit mémoire sur « comment animer un groupe de façon démocratique ? ». Cela m’a fait penser au roman des années 1970 de Georges ORWELL « 1984 ».

            Cela m’a fait pensé aussi à l’origine du concept « socialisme » forgé en 1834 par Pierre LEROUX pour désigner l’antithèse de l’individualisme exacerbé du libéralisme et de l’idéologie économique où il dit : « les hommes désassociés sont non seulement étrangers entre eux, mais nécessairement rivaux et ennemis ». On ne saurait réformer ce CA, ce trésorier qui confisque le leadership et sa directrice glissante, il faudrait un changement radical et que la nouvelle équipe fonctionne avec les valeurs des droits de l’homme et de la femme.

            Pour mémoire, au XVIII° s, « le combat des philosophes portait contre un pouvoir autocratique séculaire fondé sur la domination de l’Eglise catholique, les privilèges de la naissance et la grande propriété foncière. »[2] L’ancien slogan « on n’arrête pas le progrès » devrait être réécrit en : « On n’arrête pas la mondialisation ! ». Au XIX°s, le pouvoir actuel se dessinait déjà avec les Blancs de la droite monarchique et catholique, les Bleus de la gauche républicaine, libérale et progressiste et les Rouges du mouvement socialiste, anarchiste et communiste.  Je me considère comme anarcho-syndicaliste mais depuis que le parti socialiste a pratiqué de l’entrisme pour infiltrer ce contre-pouvoir si nécessaire qu’est le syndicalisme et que notre gouvernement dirigé par le parti socialiste réclame l’austérité pour les pauvres et que l’on ne touche pas à un éventuel impôt sur les grosses fortunes, je conserve mes valeurs en attendant dans mille ans une révolution humaniste et de gauche.

            Si les classes populaires vivent aujourd’hui de plus en plus mal, c’est donc que, pour elles, les choses allaient mieux avant le surdéveloppement du capitalisme mondial. L’hypocrisie globale politicienne pourrait restée figée sur le progrès (du biface en silex aux centrales nucléaires en oubliant le crime des crimes que furent le fascisme et le stalinisme. La logique et l’échange de bon sens sont frappées d’interdit par ce dogme du progrès à n’importe quel prix humain, nous avons quitter le terrain de la critique sociale pour un retour à l’ordre de l’épée et du goupillon.
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[1] MICHEA J.C., Le complexe d’Orphée, Paris, Climats, 2011, p.22.
 
                 « Quand, dans le même dossier de LIBERATION, l’économiste critique Jacques Sapir constate, que « la mondialisation ne marche pas, nous avons atteint le point où il nous faut revenir en arrière » ou lorsque Arnaud Montebourg, lui-même, commence à envisager sérieusement un « programme de démondialisation, c’est-à-dire de reterritorialisation de l’économie », ils retrouvent tous les deux, au contraire, cette tradition socialiste et populaire avec laquelle la gauche mitterrandienne (« citoyenne » et « antiraciste ») avait pris soin de rompre dès 1984. »[3]

Que vous soyez puissant ou misérable…

            Hier 15 janvier 2013, le JT de notre chaîne nationale a relaté pendant au maximum 2 minutes la libération du Mali de ces djihadistes (ceux qui font sauter les banques au bazooka puis coupent les mains des voleurs ?!) bandits de grand chemin par les forces françaises (merci François Hollande) et l’appui logistique belge et anglais puis ce fut ¼ d’heure sur la neige, les traîneaux des petits, les boules de neige et les poids lourds dérapant sur le verglas parce que tous les médias font partie de l’idéologie dominante et de la société du spectacle. Même dans le peu d’actualité mondiale dont nous avons été informé de façon insipide par Big Brother, les termes eux-mêmes sont sélectionnés : on doit dire « intervention humanitaire » et non « guerre de libération grâce aux anciens colonisateurs ». Nous sommes dans « une crise de croissance depuis 2008 » et non « victime d’une concentration du capital dans les mains crochues de l’Oncle Picsou, spéculateurs et dans le refinancement des banques qui versent à leurs collaborateurs des parachutes dorés »

            Il y a des tentatives de citoyens écologistes nommés « populistes/activistes » qui arrachent un champ de pommes-de-terre OGM (même si les OGM sont clairement interdits chez nous selon la loi) et non les termes plus justes d’ « exigence démocratique et écologique de faire respecter les lois même par les gros ». DSK a fait quelques jours de prison pour abus sexuel mai si c’était un citoyen lambda est-ce qu’il ne serait pas toujours en prison ? Y a –t-il deux poids et deux mesures si vous êtes un Bobo socialiste ? Pourquoi la Reine Fabiola détourne-t-elle une partie de nos impôts (sa dotation pour son personnel) pour ses neveux espagnols, elle contourne ainsi notre fiscalité pour ne payer que 7% de droits de succession au lieu de 70% en créant une Fondation, alors qu’en tant que personne royale elle devrait montrer l’exemple (son mari Baudouin ne valait pas mieux lorsque au nom de sa secte du renouveau charismatique il se déclarait en impossibilité de régner le jour du vote de la loi sur l’IVG) et ces informations sont présentées de façon neutre aux infos tout comme le fait que l’on n’impose pas les grosses fortunes en Belgique avec un premier Ministre socialiste de droite.
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[1]  MIRCEA, ibid., p.42.
 

            Le « politiquement correct » empêche ce type de réflexion qui pourrait secouer/réveiller les citoyens isolés/hypnotisés par la consommation à outrance (le matraquage du PUB à la TV). Par contre, on attise en sous-main les belliqueux musulmans qui viennent en fraude en Occident « voler notre travail » ou plutôt faire les jobs que personne ne veut étant en plus exploités par les marchands de sommeil.

Par exemple, l’arrêt total de l’immigration clandestine serait une catastrophe économique pour l’Allemagne, pays qui fait très peu d’enfants. De plus, comme tous les éleveurs le savent, plus notre humanité sera métissée plus elle sera costaude. Mais avec nos médias, ayant l’apparence de la neutralité, nous confondons les quelques agitateurs islamistes djihadistes qui veulent supplanter nos droits de l’homme par la force pour la charia moyenâgeuse avec les millions de musulmans tolérants au Sahel en tout cas.

Pour une société décente

            Georges ORWELL a été qualifié par les canadiens d’ « anarchiste conservateur » (ANARCHISME TORY). Au-delà des étiquettes, rappelons tout de même que de 1937 à ses derniers écrits, ORWELL a toujours combattu pour une société décente sous la bannière d’un socialisme épuré.[4]
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[1] La guerre d’Espagne d’ORWELL : Dans notre modernité, pour comprendre la terrible dérive de la guerre civile avec le fasciste FRANCO et ses troupes marocaines attaquant la République espagnole (avec le soutien d’HITLER préparant/testant ses armes pour la future seconde guerre mondiale), il est intéressant de relire Edgar Morin et Stéphane HESSEL (voir bibliographe sélective), Georges ORWELL et Arthur KOESTLER (le Zéro et l’infini). « Il faut que les gens comprennent que lorsqu’on parle de « se battre contre le fascisme » il s’agit de nous battre une fois de plus contre une guerre impérialiste (contre l’Allemagne) qui sera déguisée en guerre « contre le fascisme » et des millions de personnes mourront encore avant que les gens comprennent que le fascisme et la soi-disante démocratie représentative, c’est blanc bonnet et bonnet blanc » écrit Orwell dans ses Ecrits politiques (p.79). Lorsque Franco envahit l’Espagne légitime, Hitler le fournit en armements en stratégies et en conseillers militaires et beaucoup de jeunes gens idéalistes de gauche partiront d’Angleterre et de France soutenir les brigades internationales à côté du PC stalinien qui détruira surtout les révolutionnaires (Trotskystes et anarchistes).

CNT Confédération Nacional del Trabajo, cette centrale syndicale de la Confédération Nationale du Travail anarcho-syndicaliste espagnole sera fondée à Barcelone en 1910. (En France , le syndicat CGT était stalinien en en Belgique la FGTB était proche du Parti Ouvrier Belge (POB (différent de l’actuelle social –démocratie de droite). La CNT sera interdite en 1923 et en 1927 des anarchistes de la CNT constituent la FAI (Federacion Anarquista Ibérica).
Le POUM (Partido Obrero de Unification Marxista) crée en 1935 à Barcelone résulte de la fusion de la gauche communiste trotskyste d’Andreu NIN et du Bloc ouvrier et paysan. Organisation antistalinienne (les procès de Moscou) en rupture avec TROTSKI qui voulait fermer les syndicats. En mai 1937, le NKVD soviétique accuse le POUM de collusion avec les franquistes, les militants sont torturés, emprisonnés et exécutés par les forces de Staline en Catalogne. Le belge Serge VICTOR (1890-1947) animait « La Batalla » (l’organe du POUM et dénonçait les calomnies staliniennes. Franz BORKENAU (1900-1957), sociologue de l’Ecole de Francfort, se rend



            Dans son analyse de l’idéologie, ORWELL ne se limite pas à l’ultralibéralisme mais englobe aussi « la soif de pouvoir » des intellectuels politiciens, leur cynisme et leur manque de décence personnelle face au bien-être de tous. Il épingle aussi leur fascination infantile pour la violence d’Etat (austérité ! Même si tous les peuples d’Europe crient l’inverse dans toutes les manifestations publiques). Pour défendre le socialisme, il faut commencer par l’attaquer, dit-il. Dès 1937, il mène ce combat qui m’est proche : une attaque systématique contre les représentations officielles et  très permanentes du socialisme qui dominait déjà la gauche à son époque. En effet, le socialisme de référence d’ ORWELL est celui de la CNT et de la guerre d’Espagne (de CASTORIADIS dirions-nous aujourd’hui) : une société où la domination de classe serait abolie par une démocratie participative et non par la terreur stalinienne qu’il combattait comme le fascisme.

            Notons à ce propos, le commentaire éclairant de Mircéa : « Le socialisme, tel qu’on nous le présente aujourd’hui, comporte en lui quelque chose d’intrinsèquement déplaisant, quelque chose qui détourne de lui ceux qui devraient s’unir pour assumer son avènement. »[5]

La décence commune de Georges Orwell

            Mircéa, homme de gauche inclassable s’appuie beaucoup sur la lecture de l’anthropologue MAUSS pour renouer avec Orwell et son concept de « common decency ». Mauss parlait de l’idéologie du don généreux sans esprit de lucre futur et de la décence commune des gens de gauche ; (je n’emploie plus le concept de socialisme car un socialisme immobilisé dans  le jeu des hommes de pouvoir permanents redevient, selon Mircéa (et je partage ce point de vue), un retour fascisant (même si cela paraît trop fort). La décence et le respect pour les autres hommes appartiennent à la sphère des sentiments les plus profonds et les plus essentiels des hommes et ne doivent pas être confondus avec la charité chrétienne ostentatoire des dames patronnesses (Jacques BREL), un catéchisme aux commandements aliénants d’une métaphysique sous-jacente qui fait confondre la charité (donner pour en recevoir une reconnaissance) et la fraternité humaniste universelle qui est générosité sans attente de retour.

            Formé à la dialectique de l’Ecole de Francfort, je lui suis reconnaissant de l’acquisition de mon esprit critique ; homme de gauche, je suis  pour le combat d’une société socialiste décente (qui n’a rien à voir avec le parti social-démocrate PS belge et qui ne devrait pas servir de référent universel pour d’autres continents - européocentrisme). Je suis depuis toujours militant des droits de l’homme et du citoyen et je pratique – autant que faire se peut – l’aide humanitaire vis-à-vis de nos frères africains, fiers et très pauvres (la conscience humanitaire n’est ni libérale ni socialiste lorsque des enfants meurent de faim, elle est farouchement anticapitaliste). La mondialisation ou ultralibéralisme est une machine à broyer les travailleurs de tous les peuples, « machine du capitalisme sans frontière dont les élites déracinées, incultes et perpétuellement mobiles
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en Espagne, dès le début de la guerre civile et critique les agents soviétiques, il sera arrêté comme trotskiste. BORKENAU écrira toute sa vie contre les deux totalitarismes (fascisme et stalinisme).
Bertrand RUSSEL (1872-1970) rationaliste et pacifiste, ce philosophe des mathématiques, de la logique et de la connaissance rencontre ORWELL et KOESTLER en 1946 pour mettre sur pied une Ligue pour la dignité et les droits de l’homme, sans succès.
[1] Michéa, ibid., p.53.


(du FMI à la Banque mondiale) s’emploient, depuis maintenant des décennies, à dissoudre la prodigieuse diversité des civilisations existantes dans l’abstraction glacée du marché mondial, de son droit « international » uniformisateur et de sa « culture de masse » hypnotique et aliénante. »[6]

            Avec mon épouse, nous avons animé pendant 8 ans le groupe 76 de Waremme d’Amnesty International ; nous ne le regrettons pas mais nous avons mis la clé sous la paillasson car nous perdions trop de temps à financer notre affiliation alors que notre engagement était de lutter pour les prisonniers d’opinion et contre la torture. Alors, avec notre groupe solidaire, nous avons collégialement démissionné et créé une association « Mer de Chine, aide aux réfugiés ».

            Au moment de l’opération « Un bateau pour le Vietnam » organisée en 1979 sous l’animation de Bernard KOUCHNER et d’Yves MONTAND et malgré les critiques d’idéologie humanitaire, nous nous sommes battus pour l’accueil de réfugiés des boat people qui fuyaient la révolution communiste (stalinienne de Hanoi), une lutte contre l’esprit du fascisme (le goulag par exemple). Il y avait à l’époque encore des militants courageux de gauche (refusant le socialisme comme le libéralisme) tels Jean-Paul Sartre, Michel Foucault et André Glucksmann (qualifié de philosophe de pacotille, un jugement de valeur contre lequel je m’insurge, il m’a appris autant que Sartre). Et à notre grand étonnement, nous avons réussi à réveiller la conscience citoyenne de notre gros bourg (10.000 habitants) dirigé toujours à droite par le PS local. Seule concession de la commune, nous avons pu utiliser une maison vide à l’abandon ; certains l’ont nettoyée, d’autres ont trouvé des meubles, etc. et les intellectuels ont été rencontrér le Haut commissaire pour l’aide aux réfugiés pour y déposer un dossier bien ficelé.

            La citoyenneté active est encore possible car nous avons réussi à accueillir une famille laotienne avec le père, la mère enceinte et le fils, nous les avons accueillis et initiés à notre culture (y compris faire ses courses au supermarché) mais surtout nous avons sauvé la vie d’un être humain et nous en sommes fiers. Lors d’un check-up médical, la dame a montré par ses radios que lors d’un bombardement US elle avait perdu un poumon et demi ; donc il lui restait 1/2 poumon pour son accouchement et sa mise à mort. Nous avons parlé de l’IVG prophylactique et elle a compris et accepté. Ils se sont très bien intégrés et vivent toujours dans leur commune d’adoption ; ce fut un succès rassemblant du coup  autour de nous tous les vautours politiques PS, avec le même discours cynique : « on veut bien être président, etc. mais sans travailler, juste pour les honneurs ». Le jour de la constitution de notre association en asbl ; elle était morte car toutes « les petites mains » refusaient cette mainmise après-coup des politiciens. Notons que ce fut la même chose en France avec  Strauss-Kahn, Delors et Rocard.
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[1]  Michéa, ibd., p.95.
 

            Je travaillais à cette époque pour un mouvement de formation citoyenne qui était Peuple et Culture-Wallonie avec feu mon ami et maître Marcel DEPREZ. Un autre grand sage socialiste, Melchior Jasselette, autour d’un rouge bord, m’a dit « N’abandonne jamais ce progrès humaniste de l’IVG : on ne peut pas tuer une femme pour protéger un fœtus tout en interdisant les préservatifs ». Lorsque, nous formerons par après une autre asbl (Groupe d’Autoformation Psychosociale – GAP) d’aide humanitaire en Afrique, nous découvrirons les retombées de toutes ces horreurs religieuses avec des gamines qui « tombent » enceintes et dont les familles disent «  donne le bébé ou tue le ! »

            Jeune retraité de 61 ans et toujours anarcho-syndicaliste, j’ai, par les circonstances de la vie, été intéressé par une asbl portant le nom flatteur d’une communarde loyale et probe LOUISE MICHEL ; à cette époque notre association organisait en Afrique des conférences contre l’excision (Mutilations Génitales Féminines – MGF), j’ai proposé ma candidature comme administrateur car l’association prétendait s’intéresser aux MGF et les gens qui me connaissaient m’ont plébiscité à haute voix à l’AG. Mon premier contact fut avec le trésorier qui me demanda si je savais ce qu’était une IVG ; je suis non violent mais nous aurions été au XIX°, je l’aurais provoqué en duel pour offense grave. En effet, toute notre vie, avec mon épouse et mes enfants, nous avons milité et manifesté contre toutes les atteintes aux droits de l’homme (y compris lors de l’affaire du Dr PEERS qui fut acquitté par la grâce de l’écœurement populaire). N’oublions pas que s’ il y a peu de catholiques pratiquants en Belgique, c’est toujours cette mentalité qui domine notre royaume ; la famille royale n’a jamais participé à des manifestations laïques mais jamais non plus raté un seul Te Deum.Une société socialiste impliquerait l’abolition de l’idéologie de l’économie de marché, les élus permanents socialistes qui ne me connaissent pas me définissent comme utopiste, ce que je revendique plutôt que leur soft-totalitarisme avec ingérence dans le contrôle syndical. Ce sont des minorités privilégiées appelées « fils de.. » qui contrôlent l’argent, le pouvoir et l’information.

            J’ai suivi la carrière, face à la Flandre séparatiste de droite, d’un courageux militant wallon récupéré par le PS, José HAPPART qui, en fin de carrière, organisait pour ses collègues et leurs épouses un voyage au Mexique payé par la Région Wallonne (nos impôts) puis qui réclamait un parachute doré un peu avant la crise de 2008. Je fais l’hypothèse logique qu’un jeune militant de gauche confondant la gauche avec l’actuel socialisme belge se fera décourager s’il tente de venir brouter dans le pré carré en question, sauf s’il est inoffensif au niveau de sa réflexion. Pendant 40 ans, j’ai scruté le paysage PS comme Sœur Anne et je n’ai pas vu d’action significative de gauche, mais ma vue est certainement déficiente.

            « Je désire pouvoir rencontrer autrui comme un être pareil à moi et absolument différent, non pas comme un numéro, ni comme une grenouille perchée sur un autre échelon (inférieur ou supérieur, peu importe) de la hiérarchie des revenus et des pouvoirs. Je désire pouvoir le voir, et qu’il puisse me voir, comme un autre être humain, que nos rapports ne soient pas un terrain d’expression de l’agressivité, que notre compétition reste dans les limites du jeu, que nos conflits, dans la mesure où ils ne peuvent être résolus ou surmontés, concernent des problèmes et des enjeux réels, charrient le moins possible d’inconscient. Je désire qu’autrui soit libre, car ma liberté commence là où commence la liberté de l’autre et que, tout seul, je ne peux être au mieux que « vertueux dans le malheur ». Je sais combien la culture présente aggrave et exaspère leur difficulté d’être, et d’être avec les autres, et je vois qu’elle multiplie à l’infini les obstacles à leur liberté. »[7]

Conclusions partielles

            Effectivement, nous sommes dans le mythe de la pensée unique « religion du progrès », le bonheur par la consommation et tant pis si cela se réalise au détriment de l’effort de changement personnel, d’amélioration du sujet avec l’abdication chez les gens de leur capacité de penser et d’agir par eux-mêmes ; il n’y a plus d’autonomie mais la masse individualisée du troupeau aveugle ; il n’y a plus la conscience de la citoyenneté responsable pour vivre debout. ORWELL évoque nos « cerveaux enfermés dans des bocaux », nous sommes des sujets aliénés par le travail comme il le prédisait bien avant « 1984 » son roman de SF. Le souci des gens est de bien courber l’échine devant un patron sans vérifier s’il a une réelle capacité de pouvoir sur nous et/ou de se tracasser pour leurs économies qui fondent sous l’inflation sournoise mais réelle de la perte du pouvoir d’achat.

            « Doit-on, comme le veut la droite la plus inculte (ou la plus cupide) s’appuyer de façon idéologiquement rigide sur une économie intégralement privatisée, ou faut-il, au contraire (comme le veut la gauche, généralement plus soucieuse des intérêts à long terme du système capitaliste), introduire un minimum de régulation étatique et d’injection de capitaux publics (quitte à demander parfois aux maîtres du monde d’y aller de leur argent de poche) ? Ce qui est certain, c’est qu’après trente ans d’alternance unique, chacun a désormais suffisamment d’éléments en main pour juger des seuls résultats possibles de ces deux politiques complémentaires. »[8]
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[1]  CASTORIADIS Cornélius, L’institution imaginaire de la société, Paris, Seuil, 1975, P.127
[1] Michéa, ibid., p.66.


La globalisation 2008, c’est :

  • Une machine égalitaire qui échauffe les tissus sociaux et rigidifie les tensions protectrices.
  • Un chaudron qui pompe l’énergie fossile et encourage l’accaparement des terres arables du tiers monde par d’autres pays.
  • Une accélération du réchauffement de la planète, elle encourage l’irresponsabilité bancaire protégée par les Etats (sans consultation populaire de l’emploi de l’impôt de tous), et génère une tension entre les peuples partisans  de la relance et les gouvernements favorables à l’austérité.

      De plus, la crise occidentale désintègre les sociétés traditionnelles africaines. Pourtant, « dans le cochon tout est bon » devrait-on enseigner dans les pays musulmans où les enfants meurent de faim. Les inégalités s’aggravent entre les classes démunies (en-dessous du seuil de pauvreté) et les classes moyennes intoxiquées par le consumérisme exacerbé par les pubs. La démographie est en baisse en Allemagne et remplacée par la surpopulation des miséreux des flux migratoires. Les ghettos riches s’emmurent tandis que les ghettos pauvres s’accroissent et subissent un stress de plus en plus intense au travail. Face au progrès de la laïcité, les religions progressent mais sont écartelées entre modernisme et intégrisme. L’humanisme universaliste se décompose par le retour des identités meurtrières (séparatistes en Flandre).L’émancipation des femmes se donne à voir  dans les contrats par l’accession au mariage libre choisi par les couples au détriment des mariages arrangés par les familles mais les barbaries mutilatrices du clitoris « pour que les femmes soient moins frivoles » continuent à se pratiquer dans le tiers monde. Les pays émergents sont victimes des intoxications publicitaires occidentales : l’individualisme, l’égocentrisme, l’autojustification, la soif de projet. On constate la résurgence de travailleurs esclavagisés (en Chine et en Inde) permettant un accroissement  du PIB de 7 à 10% en faisant fi de la qualité humaine de vie. De plus, la participation gratuite aux tâches ménagères n’est plus prise en compte. Il y a un génocide soft du petit peuple ; on considère surtout le matériel et l’égocentrisme  qui l’emportent sur la fraternité et la solidarité.

« Vivre de mort, mourir de vivre «  dit HERACLITE

            ORWELL (II) – L’ultralibéralisme globalisant du XXI°s.

Introduction

            Militant de gauche, j’ai travaillé au XX°s. dans de nombreux mouvements d’éducation permanente aujourd’hui disparus et dont la triple finalité était l’égalité des droits, l’émancipation des femmes et la fraternité avec les déshérités et le tiers-monde : Peuple et Culture Wallonie, Fondation André Renard, Ligue de l’enseignement de Liège, la Confédération du Service civil de la Jeunesse (CSCJ – Objection de conscience), l’Internationale des Résistants à la Guerre (IRG), le Centre d’Action Laïque (CAL) et les territoires de la mémoires, le Groupe d’Autoformation Psychosociale ( GAP), etc….

            Ces deux dernières années, je me suis engagé, à mon grand dam, pour un centre de la famille portant le nom d’une de nos héroïnes : Louise MICHEL, communarde et anarchiste. En 65 ans de vie, je n’avais jamais vu pareil salmigondis pour masquer un pouvoir (citant André Renard et se déclarant en même temps Pouvoir Organisateur de type taylorien -l’anneau de Moebius ? ; ni surtout un tel management ultralibéral – comme on trouve en perpétuel développement à notre époque – basé sur la terreur et le harcèlement moral. Avec un camarade administrateur de gauche, nous avons rencontré les travailleurs de notre centre pour savoir s’ils avaient l’une ou l’autre doléance à formuler et s’ils étaient traités avec respect et dans la dignité. Le silence qui nous répondit fut éloquent et de plus le cahier des rapports était agrafé pour nous dissuader de l’ouvrir. Ce ne sera qu’à l’extérieur du centre que nous en apprendrons un peu plus sur ce management de la terreur (tu te plies ou bien tu es mutées au centre funéraire de Robermont fut le choix offert à une assistante sociale de 24 ans et à une autre, tu te plies ou tu es virée (no comment !). De retour dans notre cénacle, nous nous sommes fait injurier par la plupart des membres du CA (qui apparemment ne connaissaient pas le concept de « bouc émissaire ») et crier dessus par une avocate semblant hystérique qui, ignorante des faits, nous accusait d’un manque de déontologie ; j’ai même eu droit à des jugements ad hominem comme « cheveux long » (comme du temps de Franco en Espagne), soit le « double-langage » qu’ORWELL dénonce dans son roman « 1984 ». La directrice n’explique jamais ses comptes aux administrateurs (responsables devant l’AG), élude les demandes d’éclaircissement réservées au président et au trésorier complice et aucun membre du CA ne peut s’informer par lui-même ; voilà la loi cachée que notre pavé dans la marre a dévoilé. Le président, lors de la remise de ma démission orale et écrite, m’a reproché de ne pas parler beaucoup ; je n’ai pas répondu car lui par contre ne s’exprime qu’en jugements de valeur et lui répondre aurait été comme  me justifier à une farce de procès stalinien.

Les gens ordinaires et leurs maîtres

            « Il est bien difficile aujourd’hui, lorsque tant de sommités éminemment respectables et rémunérables clament ici et là que nous sommes, occidentaux ou nordistes, des individus libres, conscients, autonomes, responsables…de s’arc-bouter sur les schémas d’une soumission déresponsabilisante qui vous condamnera à passer pour un paria idéologique, un attardé, un laissé-pour-compte du progrès, même aux yeux de votre chef démocrate. Une recherche sans prétention faite récemment auprès de nos étudiants universitaires montre que le trait le plus caractéristique de la démocratie apparaît comme un attribut de la liberté : il s’agit de la liberté de pensée et d’opinion, qui vient loin devant le respect de l’individu. »[9]

            MICHEA (dans le Complexe d’Orphée) évoque Louise Michel [10]résistante à tous les fascismes. Après la Commune de Paris de 1871, elle fut déportée en Nouvelle Calédonie.
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[1]  BEAUVOIS Jean-Léon, Traité de la servitude libérale. Analyse de la soumission, Paris, DUNOD, 1994,P.213-214.
[1] Qui était Louise Michel ? « Les religions se dissipent au souffle du vent et nous sommes désormais les seuls maîtres de nos destinées ».(Louise Michel, Mémoires, 1886).
                « La tâche des instituteurs, ces obscurs soldats de la civilisation, est de donner au peuple les moyens                intellectuels de se révolter »(Louise Michel, Mémoires, 1886)
                                                               
         Louise est née en le 29 mai 1830 au château de Vrancourt en Haute Marne, elle est la fille hors mariage du fils du châtelain Laurent DEMAHIS et de sa servante Marianne MICHEL. Elevée par ses grands-parents, elle reçoit une solide instruction et lit Voltaire et Rousseau. En 1850, après la mort de son père et de ses grands-parents, elle est chassée du château et devient institutrice à Chaumont, elle y fonde une école libre et républicaine (laïque), y travaille trois ans puis va enseigner à Paris. Elle suit les cours du soir (Education Permanente aujourd’hui). Elle correspond de 1850 (i.e. la mort du père) à 1879 avec Victor HUGO.
                Pendant la Commune de 1871, elle défendit la barricade de la Chaussée de la Porte de Clignancourt pour le « club de la Révolution » (XVIII° arrondissement). Sa mère est arrêtée par les Versaillais et menacée d’exécution pour faire pression sur elle, si bien que Louise MICHEL se rend pour la faire libérer. Surnommée la vierge rouge, elle est condamnée à la déportation à vie et envoyée au bagne de Nouvelle Calédonie. Sous l’influence d’une autre déportée (également animatrice de la Commune), elle devient anarchiste. Elle séjourna au bagne de 1873 à 1880 (prisonnière politique) et fraternisa avec les Kanaques[1]. En tant que « peau blanche », elle sera invitée à mater une révolte KANAQUE et à l’encontre de la plupart des autres prisonniers, elle prendra fait et cause pour les autochtones colonisés par la France.
De retour en France en 1883, elle fut accueillie et acclamée par 150.000 manifestants brandissant le drapeau noir. Elle fut amnistiée en 1886 (après 23 ans, un peu comme Mandela). En 1895, elle fonde le journal « Le libertaire » avec le frère Sébastien FAURE.

            Dans l’après-guerre 40-45, ORWELL fut classé comme anarchiste « TORY » (conservateur) pour sa résistance intellectuelle et affective, à la naissance de la modernité ultralibérale du capitalisme. Dans ses « Ecrits politiques », il prône l’autogestion et l’autonomie individuelle émancipatrice avec une méfiance radicale envers toutes les relations de pouvoir abstraites (y compris de soi vers les autres, comme Camus). Il est évident, dit-il, que les rébellions purement abstraites ne peuvent déboucher que sur une politique de haine et de ressentiment amenant un autre institué despote au pouvoir.

            Donc, s’il refuse les abus d’autorité, il refuse aussi de faire table rase du passé et de « jeter l’enfant avec l’eau du bain » pour balayer toutes les valeurs morales et culturelles des générations antérieures (d’où ce qualificatif péjoratif de « conservateur »). Notons à ce propos  la réflexion de René LOURAU (dans « L’analyse institutionnelle », Paris, De minuit) qui dit en substance que, lorsque STALINE changea l’appellation de « conseil des ministres » en « Conseil du Peuple », il ne changea que le titre des dirigeants, les commissaires politiques conservant leurs privilèges et leur datcha sur la mer morte. Le britannique ORWELL était – sans le savoir – proche aussi bien du philosophe CASTORIADIS[11] que de l’Ecole de Francfort  (Marcuse, Adorno, Benjamin, Habermas,…).
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De retour en France en 1883, elle fut accueillie et acclamée par 150.000 manifestants brandissant le drapeau noir. Elle fut amnistiée en 1886 (après 23 ans, un peu comme Mandela). En 1895, elle fonde le journal « Le libertaire » avec le frère Sébastien FAURE.
        Elle milite pour aider les femmes à vivre libres et autonomes par le travail. Lassée par les calomnies et le manque de liberté d’expression, elle s’installe à Londres en 1890 où elle gère une école libertaire (du genre « Libres enfants de Summerhill »). Ma sœur Louise n’aurait jamais supporté  d’être administratrice du CA de Louise Michel de Liège, à cause de l’ambiance mesquine, autoritaire et peu fraternelle, j’en suis convaincu (je ne parle pas des militants-travailleurs). Elle meurt d’une pneumonie à Marseille, le 10.01.1905 lors d’une tournée de conférences ; 120.000 personnes l’accompagnent au cimetière de Le Valois avec l’éloge funéraire de sa loge n°3 « La philosophie sociale »(DH). Une loge à Paris porte son nom. Influencée par les travaux de Charles DARWIN, elle dénie en athée toute forme d’immortalité après la mort. Elle était anticléricale, antireligieuse et libertaire résolue, particulièrement pour l’autonomie et le droit des femmes à décider du devenir de leur corps.
[1] « Reprenons la discussion de la création de l’autonomie. La mise en question de l’institution de la société, de la représentation du monde et des significations imaginaires sociales qu’elle porte est équivalente à la création de ce que nous appelons la démocratie et la philosophie. A partir de cette rupture avec la clôture absolue qui prévalait jusque-là, apparaît une société contenant les germes de l’autonomie, à savoir d’une auto-institution explicite de la société. Et cela va de pait avec la création d’individus capables aussi d’une certaines autonomie, c’est-à-dire à la fois de questionner la loi sociale mais aussi de se questionner eux-mêmes, de questionner leurs propres normes. » CASTORIADIS Cornélius, Une société à la dérive, Paris, Seuil, 2005, p.82.
            Je rappelle que, dès 1946, ORWELL parle également de « COMMON DECENCY » (décence commune) vis-à-vis de nos perceptions d’injustice sans tabou, fut-ce aussi bien envers un socialisme dit « scientifique » qu’envers le fascisme. Notons, pour éviter toute ambigüité, qu’il ne s’agit pas ici d’une idéologie morale du bien subjective mais des sentiments de rejets de toutes les injustices ; la décence ordinaire appartient à ce qui est le plus essentiel chez l’homme voulant vivre bien en fraternité dans une démocratie de fait et non dite,  représentationnelle à vie : ne pas chercher profit de la faiblesse des uns ( le tiers-monde par exemple) ni  s’incliner devant la puissance des autres (les spéculateurs de la globalisation). Etre probe et loyal ne doit pas se confondre avec la morale puritaine protestante, source de capitalisme, dit Max WEBBER.

             La décence fait écho à l’anthropologue Marcel MAUSS avec des échanges réciproques (donner et recevoir). [12] Toutes les civilisations connues mettent en avant l’obligation de se montrer généreux et loyaux excepté l’actuelle culture ultralibérale qui encourage officiellement la cupidité, la trahison (ARCELOR MITTAL Liège), le cynisme et la thésaurisation.

            L’idée d’égalité doit être entendue non dans son sens capitaliste du « droit de tous sur tout » mais comme l’abolition des structures qui rendent possibles la domination de classe (ou l’esclavage) et donc l’exploitation du travail du plus faible en autorisant la concentration du pouvoir aux mains des minorités privilégiées qui contrôlent l’économie

            LINCOLN a mis fin à l’esclavage de 4 millions de noirs en 1865 en disant que la loi devait être la même pour tous mais sans pour cela abolir les inégalités sociales défendues par les riches propriétaires du Sud, donc en maintenant l’immoralité d’un monde établi sur le calcul égoïste de l’oppression sociale pour amasser le capital.[13]

 

Parenthèse psychosociale

            Avant que les maîtres du monde referment depuis 2008 le couvercle des possibles sur le seul progrès économique ultralibéral, particulièrement indécent en ces temps de crise où les leaders européens et la bourse proposent l’austérité pour le peuple et le renflouement des banques privées ad libitum (alors que tous les peuples de l’Europe sont dans la rue et réclament – à l’inverse – de faire payer les banques,  d’imposer les grosses fortunes et de contrôler les industriels comme MITTAL (aciérie) ou BELGACOM (énergie)), des chercheurs de l’université de Genève étudient ce mécanisme de la soumission des gens à la  pression néolibérale absurde.
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[1] MAUSS Marcel, Essai sur le don in Sociologie et anthropologie : « Cette morale est éternelle : elle est commune aux sociétés les plus évoluées, à celles du proche futur, et aux sociétés les moins élevées que nous puissions imaginer. Nous touchons le roc.  Nous ne parlons plus ne termes de droit, nous parlons d’hommes et de groupes d’hommes parce que ce sont eux, c’est la société, ce sont des sentiments d’hommes en esprit, en chair et en os, qui agissent de tout temps et ont agi partout. » Paris, PUF, 1985, p.264.
[1] « De fait, on chercherait en vain, dans tous les programmes de la gauche contemporaine, la moindre allusion à l’idéal d’une « société sans classes » (tout comme, d’ailleurs, au concept de bourgeoisie ou de classe dominante). Alors même que jamais dans l’histoire de l’humanité, les inégalités de classe n’ont atteint une telle ampleur (et un tel degré d’indécence) qu’aujourd’hui. » James BURNHAM and the Managérial Révolution, 1946, in  MICHEA J.C., L Complexe d’Orphée, ibid., p.90
                   La psychologie sociale étudie les conflits, les attitudes et comportements des gens, face au pouvoir social tout particulièrement. Dans l’après-guerre, on vanta la rationalité mais en oubliant son corollaire le despotisme de la maîtrise. La révolution cognitive actuelle bouscule ces anciens préjugés « bon chic, bon genre » :

-          La connaissance est individuelle mais alors pourquoi tant de publicité ?

-          Si le scientifique spontané/intuitif cherche à comprendre son environnement, c’est pour un mieux-être ; y a-t-il toujours concordance avec le progrès industriel ?

Le cognitiviste social Fritz HEIDER (The Psychology of Interpersonnal Relations, New-York, Wiley, 1958) nous dit que, pour se stabiliser, les gens ont besoin de distinguer le bon grain de l’ivraie avant de réguler leur action. Mais quels sont les facteurs sélectifs déterminants ? Le comportement de ceux auxquels nous nous intéressons est aussi ambigu que le nôtre. Pour cela, propose HEIDER, remontons aux conditions causales des phénomènes.

En 1972, Mc Arthur et Weiner élaborent la théorie de l’attribution causale, à savoir, comment nous attribuons les succès ou les échecs, - les nôtres comme ceux des autres - à des causes internes ou externes à la personne et quelles sont les répercussions inconsciemment formatées de la performance sur notre propre comportement. Il existe parfois des erreurs fondamentales d’attribution (nous dit en 1977 Lee ROSS) : nous oublions que le comportement observé et que nous cherchons à comprendre n’est pas le sujet mais un rôle que celui-ci a accepté de jouer (qu’il a introjecté) et nous lui attribuons la responsabilité comme une tendance personnelle. Regardons par exemple des leaders qui abusent du faux argument dit « d’autorité » pour bluffer leurs subordonnés : « Vous connaissez cela ? Non, alors allez d’abord l’apprendre ! ».

            En Dynamique des Groupes (DG), on insiste aussi sur la négligence des contraintes institutionnelles et de la disposition spatiale. Par exemple, en formation de groupe, j’établis une disposition « circulaire » avec les tables et les chaises pour mieux se parler l’un à l’autre et non au formateur. Cependant, cette disposition se transforme parfois en U où je suis isolé au bout des deux fins du U comme le leader reconnu/patenté.

            J’attire aussi l’attention sur le fait que, si nous faisons un jeu de rôle avec 5 acteurs/actrices autour d’une table où d’un côté se placent A et B et de l’autre C, D et E, il est vérifié (« qui parle à qui ? ») que  A ou B auront un impact plus significatif sur le sous-groupe puisque la disposition favorise les échanges de 3 vers les 2 ou vers 1 des 2. Il est ensuite difficile pour les autres membres de reconnaître que l’influence de A ou B pouvait être renforcée simplement par la place stratégique.

            Un autre facteur important biaisant la position scientifique spontanée est la croyance en la détermination et l’interprétation fournie c’est-à-dire non pas ce que font les gens mais ce qui leur arrive dans la vie (locus of control – LOC). L’idéologie ultralibérale affirme la liberté individuelle (d’entreprendre comme William TAYLOR) et postule que la réussite est une question de mérite personnel. Une grossière erreur banalisée de management est dans les sanctions infligées à un subalterne. En effet, son histoire de vie peut renforcer sa soumission ou au contraire provoquer sa rébellion. La question du Locus of contrôle est le lieu dépendant des paramètres de l’histoire vécue par le sujet ; ce lieu a un renforcement positif ou négatif et peut être lui-même (sa conscience), son comportement (conditionnement éducatif), les autres, les « tout-puissants » et/ou la complexité de sa vie.

            Celui qui en 1966 va poser les bonnes questions sur le LOC est le psychosociologue ROTTER ; un étudiant pense-t-il que sa réussite aux examens est liée au travail accompli ou non pour le préparer ou lié à la bienveillance des examinateurs ? « Cette dichotomie distinguera désormais des anticipations dites INTERNES (les premières dans l’exemple : celles qui établissent un lien entre l’acteur ou son comportement et ce qui lui arrive) et des anticipations dites EXTERNES (les secondes : celles qui n’établissent pas de lien ou qui n’établissent que peu de lien entre l’acteur et ce qui lui arrive). Il devrait donc exister des sujets internes qui pensent avoir une possibilité d’agir sur ce qui se passe et des sujets externes qui pensent que les choses se déroulent indépendamment des pauvres bougres qu’ils sont.(…) (autrement dit avec cette échelle)les sujets internes sont des gens bien sous tout rapport (GEER : Gens Eminemment Respectables et Rémunérables) et, en ombre portée, qu’il n’est vraiment pas facile de par chez nous de n’être qu’un individu externe, une cible du travail social (un GGPRA : Gens Potentiellement Rééducables pour Assistance). »[14]

            En section professionnelle horticole, alors que je ne donnais pas cours dans cette section, j’ai vu un gamin en colère jeter une pierre dans une fenêtre de l’école, j’étais à 2 m derrière lui sur un chemin herbeux. Je lui ai posé la question :« pourquoi as-tu fait cela ? ». Il m’a regardé, reconnu comme prof et m’a dit : « Ce n’est pas moi ! ». Je lui ai répondu que j’étais juste derrière lui et que mettre mes propos en doute n’était pas des plus logiques. Il m’a répété : « Ce n’est pas moi, je vous jure ! ». J’étais face à un GPRA et, comme pour lui sanction = expulsion de l’école, je lui ai dit de filer ! De plus, la veille, en réunion du personnel, le directeur (GEER) proche de la retraite et aigri nous avait déclaré qu’il allait saborder l’école, que lui serait de toute façon retraité mais nous tous sans travail. En principe, c’est plus grave qu’une vitre mais il n’y a jamais de sanction pour les GEER fatigués.

            La déviance stigmatisée aujourd’hui est en fait que les externes sont des retardés mentaux. Pour prendre encore un autre exemple, lorsqu’un enfant est interrogé par son instituteur sur une erreur et qu’il fait  son « mea culpa », il est bien vu ; par contre, s’il dit que c’est la faute aux autres, au système, il est mal vu. J’insiste sur les clés de la réussite de l’école bourgeoise ; si lors d’un examen oral, malgré des critères d’évaluation dits objectifs, on a une tendance judéo-chrétienne  à se fustiger, on sera bien vu (aussi bien par le prof que par l’éventuel employeur) et par contre, l’étudiant migrant, de milieu pauvre en pays pauvre, échoué chez nous  qui va reporter la faute sur l’extérieur sera perçu comme peu capable de se remettre en question ! Indépendamment des études,  j’ajoute mes propres hypothèses sur la violence verbale, dernière ligne de défense de l’âme humaine (avant le passage à l’acte dit violent) : « Quel livre lisez-vous en ce moment ? – Camus ! – Bien, parlez-nous de Camus ? Cela ne vous regarde pas ! (no comment sur l’évaluation de cette prestation avec nos préjugés ordinaires).

            Christopher LARSH (Le seul et vrai paradis) rejoint le sociologue GURWITCH à propos de la dialectique : toutes les dialectiques apologétiques sont des idéologies (y compris le marxisme), l’histoire n’est pas un progrès linéaire vers une espérance transcendantale de l’humanité et le dit progrès est souvent une régression de la psychologie relationnelle au profit de quelques nantis (de moins en moins nombreux mais de plus en plus colossalement riches). L’optimisme guimauve de la sortie rapide de notre crise économique inéluctable est un leurre. Il nous faut retrouver - comme du temps d’Henri David THOREAU - une pensée critique offensive. J’ai toujours été, comme lui, non-violent mais à refaire ma vie, face au cynisme de la violence d’Etat, je m’interroge sur la légitimité de la violence de résistance (que je vais développer avec CASTORIADIS). Les leaders ont la technologie pour tuer les terroristes (mais tout autant les révolutionnaires ?) Imaginons 1789, sans quelques têtes coupées, ce serait comme l’hydre de l’Herne.

Tuer un humain est scandaleux mais j’ai le sentiment que j’aurais moins de scrupule envers un spéculateur qui, par son avidité, tue des milliers d’enfants de faim chaque année dans le tiers-monde.

 

La dialectique historique du philosophe CASTORIADIS[15]

            Si nous partons de FREUD, dans son ouvrage « Totem et Tabou », nous savons que les frères mécontents des prérogatives du père (génétique et/ou chef de la tribu) s’unirent, le tuèrent, le mangèrent (« ceci est mon corps ») et construisirent ainsi la société des égaux. Mais des petits malins s’autoproclamant chaman, grand prêtre ou Oulémas prétendirent communiquer avec son âme dans l’au-delà. La peur et la culpabilité firent le reste et on adora « le petit père des peuples » puis on lui trouva un remplaçant bien placé grâce à l’infâme clergé présent dans toutes les cultures et parlant de spiritualité surtout pour manipuler la matérialité (Les Frères musulmans d’Egypte par exemple).Ainsi, lorsque j’étais petit (et malléable), j’étudiais l’histoire des rois de France et mes enseignants faisaient fi de l’histoire des révolutions et des contestations citoyennes. Cette alliance entre le sabre et le goupillon s’appellera :
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[1]  « L’héritage du mouvement ouvrier est précieux aussi bien positivement que négativement. Les luttes ouvrières ont montré les immenses capacités d’auto-organisation que possède le peuple, elles ont créé des formes qui gardent pour nous une valeur d’exemple ; ainsi les conseils ouvriers. Mais elles ont aussi montré ce

  • L’INSTITUE, celui (peu importe son titre) qui a aujourd’hui le pouvoir sur les autres et veut le conserver toute sa vie y compris dans sa descendance « fils de », un mode féodal de servage de la majorité, CASTORIADIS tout comme les penseurs de l’Ecole de Francfort évoquèrent le mouvement constant dialectique d’HERACLITE et parlèrent enfin de tous ces courageux  souvent oubliés dans  les livres, de ces hommes qui voulaient établir une égalité par la démocratie. On les appelle aujourd’hui :
  • INSTITUANT, les porteurs du changement et d’utopie pas nécessairement positive. En effet, au-delà de l’utopie nécessaire pour rêver et créer des nouveaux possibles, les institués (champions de la permanence) récupérèrent les thèses consistant à abattre tous les privilèges et à accorder à tous des droits élémentaires , dits droits de l’homme et de la femme. Ces instances symboliques s’affrontent depuis la nuit des temps. Si les instituants gagnent, ce seront des libérateurs ; s’ils perdent, ce seront des terroristes d’extrême-gauche.
  • L’INSTITUTIONNALISATION, c’est lorsque l’on trouve des compromis démocratiques, mais le plus souvent, l’instituant se faisant tuer par l’institué, on récupère sur son cadavre ses idées (le CHE). De toute façon, avec le temps, le meilleur des révolutionnaires est récupéré par le pouvoir (CASTRO à Cuba est mon maître exemple).
  • Comme aux échecs, on peut mettre le roi échec et mat mais il revient à la partie suivante, ce pourquoi nous avons besoin d’un esprit critique permanent et de personnes probes et intègres pour, avec sérénité, informer que la social-démocratie belge n’est plus de gauche mais de centre-droite. La réalité du progrès est qu’il n’est pas univoque ultralibéral mais qu’il peut aussi faire partie d’une nouvelle vague instituante pas encore bien comprise (comme celle de la décroissance par exemple). Lorsque la vigilance de la démocratie participative s’endort, il y a toujours régression et jamais des lendemains qui chantent où l’on rase gratuit.
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qu’il ne faut pas faire : aliéner sa souveraineté et son initiative à un Parti, croire qu’il puisse exister des fonctionnaires de l’humanité désintéressés. » CASTORIADIS, Une société…, ibid.,p.235.
 
L’imaginaire de la société repose sur nos volontés combatives d’être des hommes libres et égaux mais cela peut n’être parfois qu’une illusion (OMC, FMI au tiers-monde) ; certes, cela reste un espoir potentiel mais aujourd’hui, toutes les forces politiques sont verrouillées à droite. Chez nous en Wallonie, le PS a trahi le POB et le syndicalisme renardiste (qui proposait le « contrôle ouvrier ») en faisant de l’entrisme dans ce contre-pouvoir vital pour une démocratie et en contrôlant par le clientélisme plus de 60% de nos institutions.

 

Donc, ces trois mouvements ne sont pas figés dans un temps déterminé. Je fais l’hypothèse que l’INSTITUE se basant sur l’UNIVERSALITE est le statut le plus fréquent et le moins avoué de nos civilisations (au double discours), que l’INSTITUANT se basant sur de petits groupes ou sur des personnalités est un moment PARTICULIER qui sera soit usé et passera tout seul au pouvoir, soit acheté, soit tué. Et il n’est pas si facile que cela de nos jours de trouver des « meneurs » (notons le côté péjoratif), des hommes intègres et capables car nous sommes dans le consumérisme et le narcissisme à tout va.

Le narcissisme et le consumérisme

 « Ô hommes, combien vous seriez plus heureux si vos femmes l’étaient » (Louise MICHEL).

            Nous sommes à une époque de dégoût du passé du XX°s par la recherche de l’authenticité et l’éloignement de la politique, vers la sagesse de l’Orient et la prise de conscience autonome. Comme le dit Woody Allen : « Je crois que la sexualité et la mort sont deux expériences qui n’arrivent qu’une fois dans la vie. » Vivre dans l’ici et maintenant, vivre pour soi et non pour la famille ou la postérité, comme avant les années 1970, mais avec la forte nuance que les idéologies (partis et sectes) sont cette fois expurgées ; ce qui compte aujourd’hui, c’est le bien-être personnel et la sécurité psychique. Le progrès social est inversé, on parle d’autonomie et on vit sur le mode des privatisations, le travailleur a livré ses compétences techniques aux grandes entreprises, la famille ne parvient plus à élever ses enfants sans experts psychologues, les anciennes traditions d’autonomie de la sphère de la vie quotidienne (Habermas) cèdent la place à la bureaucratie communale. Narcisse n’a plus de place, il n’est plus qu’un pion, consommateur isolé qui a peur de tout, en particulier de l’insécurité.

            Le Narcisse ancien était un individualiste farouche qui s’associait selon sa volonté, les faits et les arguments ; le Narcisse actuel, prisonnier de son look (de la frime) ne s’intéresse qu’à ce qui brille (comme ce qu’il voudrait être) : les vedettes, la célébrité , la distinction que donne le fric, les objets brillants volés par la pie. Il a besoin des images de lui envoyées par ces autres pour s’estimer lui-même. Lors de la conquête de l’Ouest, le pionnier américain donnait libre cours à sa sauvagerie (scalp), à sa rapacité et à sa cruauté meurtrière en rêvant à une communauté pieuse apportant la sécurité aux femmes et aux enfants. Aujourd’hui, l’américain civilisé et blasé d’internet s’ennuie. Les gens se plaignent du manque de sensations et sont désensibilisés, ils sont plus dans la rage des conquêtes fictives par ordinateur de civilisations factices extérieures que dans le désir que le surmoi a verrouillé. Ils sont incolores, soumis, inaltérables, similaires et sociables (plus de 70 % de la population américaine est sous prozac, l’hormone sérotonine ou autres dépresseurs). La bureaucratie contrôle tout, y compris l’autorité parentale. Les enfants ROI fleurissent comme des fleurs malsaines car il n’y a plus de garde-fou (les pères, les professeurs, les prêtres). Le paradoxe de ces figures d’autorité qui se délitent n’est pas l’émergence du ça dans les fantasmes primitifs de l’enfant mais d’un surmoi téléchargé de rage sadique remplaçant celui des parents.

            L’enfant qui n’a plus de modèle sage et serein pour créer son moi respectable se concentre sur la toute puissance infantile qui ressemble non au narcissisme mais au moi impérial, un moi dévoreur d’expériences et maniaque de lui-même : il veut devenir le maître du monde mais tombe dans un trou noir.[16]

            Assailli par l’anxiété et un sentiment de vide intérieur, l’homme psychologique du XXI°s a plus l’occasion de se confronter au vide de sa mort qu’avec sa sexualité. A contrario des idéaux des années 1970 en recherche permanente d’auto développement ou d’une transcendance spirituelle  (intellectuelle ou avec les soucoupes volantes selon son choix), il n’est plus en quête de la paix de son esprit mais dans une dépression glauque poussée pour un consumérisme vain.

            Il y a 100 ans, FREUD avait auto inventé la mission de supprimer les inhibitions et de reconnaître nos pulsions ; maintenant, la sexualité (avec les clubs de rencontre sur internet) ne pose plus trop de problèmes, ce serait plutôt la carence en affectivité et en sublimation (CASTORIADIS) qu’il faudrait combler en lieu et place du « Cher Moi ». J’ai été impressionné d’entendre un jour un GI qui pleurait sur lui-même pour avoir massacré des femmes et des enfants à My-lai au Vietnam se faire répondre par le Vénérable  Thich Nhat Hank que ceux-là étaient morts mais que chaque jour, des milliers d’autres mourraient et donc qu’il pourrait agir pour eux plutôt que de se lamenter sur lui-même.
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[1] «J’ai six ans et je suis un génie. Mon cerveau remplit le monde et le monde remplit mon cerveau.  Je m’empiffre de Google et deviens le président Bush et Dieu en même temps. Il suffit de télécharger et on peut voir les filles se faire violer dans le vagin ou dans l’anus par des chevaux ou des chiens ou tout ce qu’on veut, clic clic clic avec le sperme de la bête sur leurs lèvres souriantes. »HUSTON Nancy, Lignes de faille, Paris , J’ai lu,2006,  P.15 & 24

           Libérer l’humanité aliénée en combattant les spéculateurs est une tâche qui nous rendrait du sens, non pas comme auparavant avec un esprit de sacrifice mais au contraire en conservant les acquis du développement personnel (GESTALT, Tai-chi, bioénergie, autohypnose, thérapie reichienne, médiations, yoga, etc.) que l’on pourrait résumer dans la finalité « apprendre à s’aimer suffisamment soi-même au lieu de se plaire devant son miroir » ou encore « vivre sa sexualité pour y prendre du plaisir sans l’étouffer aujourd’hui sous  la compétition et hier sous les conditionnements puritains ».

Pour conclure avec ORWELL et MICHEA

            Le noyau de la « décence commune » issu de l’idéal d’une société sans classe comporte une dimension universelle : l’émancipation des travailleurs doit correspondre à celle du genre humain global. Le combat pour un retour à une socialité décente ne doit pas se limiter à l’occident mais s’ouvrir à l’internationalisme (situationnisme) c’est-à-dire dans le développement d’actions communes des travailleurs dans tous les pays contre l’ennemi commun de toutes les civilisations, à savoir le capitalisme sans frontière avec des élites technocrates (du FMI, de l’OMC, de la Banque mondiale) qui s’emploient à détruire les peuples du tiers-monde dans l’abstraction mortifère du « marché global et de sa culture hypnotique et aliénante.» [17]

            En tant que membre fondateur du GAP (Groupe d’Autoformation-Autogestion Psychosociale) apportant une aide humanitaire en Afrique sahélienne,  principalement pour les jeunes filles victimes d’un manque d’émancipation et de tortures comme l’excision, en tant qu’homme libre, de bonne mœurs et  syndicaliste je demande à tous les hommes debout de boycotter partout l’indécence.

Jean-Marie LANGE, formateur GAP, 15.02.2013

(Bibliographie de référence)

BEAUVOIS Jean-Léon, Traité de la servitude libérale. Analyse de la soumission, Paris, DUNOD, 1994.

BEGOUT Bruce, De la décence ordinaire, Paris, Allia, 2008.

CASTORIADIS Cornélius, L’institution imaginaire de la société, Paris, Seuil, 1975.

CASTORIADIS Cornélius, Une société à la dérive, Paris, Seuil, 2005

CONANT James, Orwell ou le pouvoir de la vérité, Paris, Agone, 2012.

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DOHET Julien, Le darwinisme volé, Liège, Territoire de la mémoire, 2011

 LASCH C. & CASTORIADIS C., La culture de l’égoïsme, Paris, Climats, 2012.

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MAUSS Marcel, Essai sur le don in Sociologie et anthropologie, Paris, PUF,  1985.

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MICHEA Jean-Claude, Le complexe d’Orphée. La gauche, les gens ordinaires et la religion du progrès, Paris, Climats, 2011.

MORIN E., Ma gauche, Paris, François Bourin, 2010.

MORIN E. Pour une politique de civilisation, paris, Arléa, 2008.

MORIN E. & HESSEL S., Le chemin de l’espérance, Paris, Fayard, 2011.

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ORWELL Georges, Ecrits politiques (1928-1949), Sur le socialisme, les intellectuels et la démocratie, Marseille, Agone, 2009.

ORWELL G. « 1984 » (roman SF) Paris, Folio, Gallimard, 1950, Ecole de la jouissance des autres (les spéculateurs des divers des douleurs) Perception anti-futur.

WARIS Dirie, L’aube du désert, Paris, J’ai lu,, 2002
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[1] Certains pays asiatiques, comme la Corée du Sud, ont déjà poussé si loin leur programme d’urbanisation capitaliste qu’ils en sont désormais réduits à sous-louer, ou acheter, des régions entières du continent africain afin d’un installer une version délocalisée de leur propre « agriculture( au cours des dix dernières années, ce sont ainsi 50 millions d’hectares de terre arables qui ont été enlevés aux pays pauvres par les riches des pays riches). » MICHEA Jean-Claude, Le Complexe d’Orphée. La gauche, les gens ordinaires et la religion du progrès, Paris, Climats, 2011, p.97.

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