lundi 26 octobre 2009

Le sacré et l'éducation

"Ce qui fait notre différence c'est que nous discutons et persuadons. Nous acceptons les autres points de vue. Si nous cessions d'agir ainsi, qu'est-ce qui nous différencierait des barbares ? La démocratie existe afin d'entendre l'opinion de ceux qui ne sont pas d'accord avec nous (le contre-pouvoir). A quoi servirait de siéger si nous n'écoutions pas des avis différents ? C'est notre force, pas notre faiblesse."(Ian PEARS)[1]

Notre société est malade des accrocs des sphères de pouvoir; les hommes d'affaire néolibéraux, après le renflouement des banques par l'Etat fin 2008, distribuent les parapluies dorés alors que le pouvoir d'achat de tous les contribuables a été sacrifié par ces classes politiques délétères qui veulent le pouvoir de gestion à n'importe quel prix de bassesse : les luttes ethniques flamandes avec scission de la sécurité sociale et transfert des casernes en Flandres, les cartes d' identité délivrées avec photos masquées aux femmes voilées à Bruxelles, les cumuls des mandats et parapluies, comme dans le privé, au parti socialiste (dit des travailleurs), etc.

Et de l'autre côté de la Méditerranée, des jeunes innocents rêvent de l'El Dorado européen au point de risquer leurs vie en la confiant à des passeurs sans scrupule qui les exploitent ou les tuent et quand quelques-uns d'entre eux arrivent en Belgique ils sont enfermés dans des centres dits d'accueil et refoulés parfois cinq ans après; donc ils prennent le maquis s'ils le peuvent et vivent d'expédients.

"L'islam, dans sa version fondamentaliste, a cette vertu principale de nous contraindre à réévaluer tout ce que nous tenions pour acquis : le régime démocratique, la liberté d'expression, la tolérance. Il nous oblige, surtout en France, à reconsidérer le fait religieux. Tout ce qui semblait aller de soi doit être repensé grâce aux objections des fidèles, des théologiens, des imans, résolus à ne rien concéder à nos sociétés permissives. Ces objections faites à nos certitudes, ne les balayons pas d'un revers de la main. Même s'il ne fait aucun doute que le radicalisme islamiste sera vaincu un jour – mais au prix de quelles souffrances, de combien de centaines de milliers de morts ? – acceptons qu'un ennemi nous soit né et nous aide à rester vigilants, en état d'alerte."(Pascal BRUCKNER)[2]

Il y a vers l'Europe, des mouvements migratoires sociologiques de grande ampleur, que des murs racistes comme ceux de type israélien ne pourront jamais arrêtés. Au lieu de faire une chasse aux "sans-papiers", notre communauté devrait, sur la base de notre sacré laïque, les droits de l'homme, les accueillir dans la dignité et les intégrer par l'éducation dans la différence mais sans se soumettre aux diktats religieux moyenâgeux de certains. Les barbares sont aux portes de Rome, mais faut-il détruire Carthage ?

"Quand il eut fait raser Carthage après l'avoir défaite, le général romain Scipion Emilien imagina, dans une intuition fulgurante, un sort identique pour Rome et vit l'Empire tué par son propre triomphe? Le même mouvement qui l'avait hissé sur les cimes pouvait le précipiter dans l'abîme. C'est la marque d'un grand homme, nous dit l'historien grec Polybe, que de penser la coïncidence toujours possible de la victoire et de la ruine. Le vertige du succès facile est mauvais conseiller s'il renforce un Etat, une nation dans la certitude de son invincibilité."[3]

Qu'est-ce que l'éducation ?

L'éducation est un double concept. Cela peut être la bonne éducation transmise par les parents à être poli, à apprendre le savoir-vivre à table mais aussi à respecter les profs et les femmes, à choisir sa philosophie ou sa religion en toute liberté (malgré les déterminismes familiaux), en respectant donc tous les humains. Mais ce même concept appliqué à l'école concerne alors le savoir et savoir-faire en écoutant le maître, en mettant ses leçons en pratique, en étant présent régulièrement et ponctuel en classe, en étudiant chez soi les matières vues ("Putain ! La galère !"), soit l'acceptation de frustrations dans le court terme pour un futur choisi.

La première marche est donc le savoir-être transmis par la famille du primo-arrivant. Dans une horde primitive d'hominidés, le père-chef a la force physique et est naturellement celui qui impose les normes. Imaginons cependant une famille arrivant d'une contrée lointaine et montagneuse où le père donne des baffes pour se faire respecter et où les jeunes mâles ici à Bruxelles apprennent plus rapidement le français et acquièrent de ce fait une suprématie vis-à-vis des papiers et de la bureaucratie. Alors, le père perd parfois son pouvoir d'éducation et le fantasme de toute-puissance de la petite enfance renaît chez l'adolescent qui veut la réalisation de ses désirs, maintenant et tout de suite. Ainsi, il va dire dans la même phrase le même irrespect qu'à son père : "Tu me parles mal !(projection). Baisse les yeux !(signe d'agression chez les gorilles). Je nique ta mère ! (pulsion)."

Il a maîtrisé le père et, saoulé de son pouvoir, s'imagine maîtriser le SYSTEME de sélection cachée derrière le discours lénifiant de l'enseignement pour tous, celui qui va l'évaluer sur son insertion normative. En effet, le prof n'est qu'un pion mais si on lui a parlé ainsi, il ne va pas être enclin à la mansuétude et s'il manque, ne fut-ce qu'un demi-point à l'apprenant, celui-ci en conseil de classe sera réorienté vers une section technique puis une section professionnelle puis en CEFA (apprentissage par alternance en usine) et il va de lui-même comprendre mais trop tard qu'il est largué sur le plan des bonnes filières conduisant à des emplois intéressants.

Un autre facteur intervient également chez les enfants n'ayant pas reçu d'éducation familiale ou savoir-vivre ensemble et à la possibilité de se remettre en question (on ne peut pas avoir toujours raison ?) : tout ce qui leur arrive ne sera jamais leur faute mais celle d'un facteur externe. Ils vont trouver toute contrariété trop injuste envers eux et "avoir la rage" contre ceux qui réussissent dans cette société de consommation dont leurs parents rêvaient pour eux : ils n'ont pas trouvé les clefs implicites.

Une étude de psychologie sociale a démontré que l'enseignant "aime" mieux les étudiants capables d'autocritiques appelés les "internes" par rapport aux autres dont ce n'est jamais la faute, les "externes" et ont donc tendance à noter ces derniers de façon plus sévère (même si les enseignants ne reconnaissent pas cette discrimination de leur part).

Alors le jeune primo-arrivant devenu majeur va - si ses papiers sont en ordre – recevoir l'aide sociale et continuer à vivre chez ses parents dans une cité éloignée du centre ville. Il va s'ennuyer et se reconnaître dans le groupe des autres paumés qui glandent et cela deviendra peut-être une bande urbaine (dealers de drogue, voleurs, drogués et bagarreurs). Si un jeune d'un autre quartier débarque sur le territoire de la bande, on le tabasse ou on le saigne au couteau (sans autre raisons que d'avoir pénétrer sur le territoire de ce clan de loups). Si une frangine se promène maquillée, en jupe et sans voile on la violera dans une tournante (c'est sa faute !) et la police n'intervient plus ou mollement parce que derrière elle la justice, toujours pas informatisée, ne suit pas et libère les délinquants, démotivant ainsi les agents. Ce sera donc, comme avec le père, un renforcement tacite de ces comportements délictueux et l'avènement d'une zone de non-droit comme un chancre dans notre pays qui a des lois pour protéger théoriquement les droits naturels de ses habitants.

Chacun est libre de s'exprimer et de s'habiller comme il veut si sa tenue reste décente. Toutefois, la violence, les menaces, les car-jackings, l'imposition du hidjab, etc. toutes ces insultes et provocations imbéciles ne pourront qu'augmenter la distance que vont prendre les autochtones qui les accueillent. Dommage, le très beau film WELCOME à propos des migrants de Calais vers l'Angleterre montre bien la sympathie des gens et la volonté d'entraide envers les sans-papiers, ce qui contrarie les autorités française.

"Le ministre de 'l'émigration prétend que le "délit de solidarité" n'existe pas. Or l'article 62-1 du Code des étrangers punit de 5 ans de prison et 30.000 euros d'amende quiconque aura "aidé ou facilité" l'entrée et le séjour d'un sans-papier en France.(…) Si vous n'avez pas été effrayé par les tracts distribués par la police menaçant ceux qui s'opposeraient à une expulsion d'étrangers de 8 ans de prison (tous délits confondus) et qu'il vous vient à l'idée de voler au secours d'un sans-papier entravé au fond de l'avion, eh bien, levez-vous, faites connaître votre indignation au commandant de bord ! En général, cela suffit pour que votre protégé soit débarqué, et vous aussi d'ailleurs. Avec, en prime, garde à vue et incitation à la rébellion"(2 mois de prison, 7500 euros d'amende) et "entrave à la circulation d'un aéronef afin de soutenir des personnes faisant l'objet d'une reconduite à la frontière"(5 ans, 18.000 euros d'amende, article L282-1 du Code de l'aviation)."[4]

Mais dans un esprit de prévention du racisme, disons aussi le non-dit, calmement et sans haine, en observant les faits et en les alignant : combien de touristes occidentaux apportant des devises ont insulté des femmes arabo-musulmanes ? Combien de jeunes européens ont fait sauter des mosquées dans le Maghreb ou en Arabie pour protester contre une caricature du pape ou du Christ ? Par contre, je constate que la communauté marocaine de Bruxelles se sert de nos structures sans vergogne, insulte les cyclistes autochtones qui freinent le trafic dans SON quartier, prend l'aide sociale (sans contrepartie de travaux public) et l'envoie au pays via la Western Union mais ne donne jamais rien à son pays d'accueil, pas même le respect de son mobilier urbain (tags, pavés dans les vitrines, tailladage des sièges dans les bus, crachats partout, cannettes à côté des poubelles, etc.) On n'a pas à être plus vertueux parce que l'on est immigré mais tout de même, 30% de la population carcérale est marocaine et dans les 19 bandes urbaines de Bruxelles, 10 sont subsahariennes, 6 du Maghreb et 3 autochtones !

Sans être nullement d'accord avec le président d'extrême droite (dans les faits) Nicolas SARKOSY, il faudrait faire un tri non bureaucratique : que des familles intégrées avec les enfants dans nos écoles depuis plusieurs années ne soient plus inquiétées par l'Office des étrangers, que des demandeurs d'asile ne soient plus parqués dans des centres fermés (comme Vottem ou Steenokerzeel) mais par contre que des délinquants récidivistes soient renvoyés par charters dans leurs pays d'origine. Nous n'avons que faire des mafieux albanais ou tchéchènes qui contrôlent chez nous le trafic des êtres humains, que faire des voyous de Kinshasa et des dealers de toutes sortes devant nos écoles. Et surtout pas de fanatiques religieux qui crachent sur notre sacré : les droits de l'homme avec la complicité des politiciens sans âme et prêts à tout car en mal de voix.

Que peut-on faire ?

Notre sacré à nous, c'est la désacralisation; alors pourquoi cette lâcheté de nos élus vis-à-vis des piscines spéciales ou des cartes d'identité avec photos voilées ? Ne confondons pas ceux qui se servent du Coran à des fins politiques et non spirituelles. La modernité de l'Afrique et sa démocratisation passeront par l'islam et non contre lui car des millions de musulmans sont tolérants et peuvent vivre en paix avec nous sans pour autant nous empêcher de vivre selon nos valeurs des Lumières. Par humour, deux enfants d'école primaire sont venus en classe avec des chapeaux de Gilles de Binche et lorsqu'on les a questionnés, ils ont dit : "que c'était leur choix et leur coutume !"

Nous avons fait des lois contre le pseudo-délit de sale gueule et il est interdit de discriminer à l'embauche. Certes mais ce n'est pas suffisant et nous devons pouvoir fournir des cours de "comment réussir un entretien d'embauche tout en restant courtois !" Je suis contre tous les racismes mais je peux comprendre ce petit patron de PME qui ne veut pas dans son équipe des travailleurs tire-au-flanc ou mal embouchés. Les lois non discriminatives ne suffisent pas, il faut des mesures d'accompagnement avec des profs-experts en savoir-vivre invisible. Pourquoi dans les écoles donner à de jeunes profs inexpérimentés des cours d'accueil pour primo-arrivants ne parlant pas français ? Notre ennemi est chez nous; ce sont la corruption, le piston politique et la bureaucratie qui en arrivent à dénier les mérites des communicateurs expérimentés.

Refusons à la fois les colonisés imaginaires (c'était il y a 50 ans !) et les lobbies de la droite européenne hypocrite. Est-ce que quelqu'un a vu depuis le Plan Mansholt en 1972, un acte social de gauche dans la courte histoire de l'Europe ? Pendant que l'on fait appel à la victimisation compulsive[5] et que l'on attire notre attention sur ce pseudo-ennemi extérieur qui arrive à nos frontières, l'hypocrisie néolibérale, non ébranlée par la crise de 2008, en viendra bientôt à nous vendre la nature comme l'eau et l'air pur.

Luttons, fermement certes, contre les terroristes fondamentalistes qui cherchent par la terreur à déstabiliser l'Europe mais – pour l'humanité future de nos enfants communs - ne mélangeons pas ces quelques fanatiques avec nos frères humains de la seule race qui peuple la terre HOMO SAPIENS SAPIENS.

Jean-Marie Lange, 26.10.2009
[1] PEARS Iain, "Le songe de Scipion", Paris, Pocket, 2006, p. 60.

[2] BRUCKNER Pascal, La Tyrannie de la pénitence. Essai sur le masochisme occidental, Paris, Livre de Poche, 2008, p.155.

[3] BRUCKNER P., ibid., p.231.

[4] Les dossiers du canard enchaîné, "Je te vois !" Filés ! Fichés ! Fliqués ! Comment nous sommes tous sous surveillance", Paris, juin 2009, p.77.

[5] " Ce que la pensée victimaire ressuscite, c'est l'ancienne catégorie religieuse de la malédiction. Comment éviter alors de se transformer en lobbies de suppliciés professionnels, disputant à d'autres leurs parts de marché et la couronne du martyr ? De même qu'il y a des juifs imaginaires, il y a des esclaves et des colonies imaginaires qui veulent se draper dans une légende maudite.(…) On ne fonde pas un sentiment d'appartenance sur un malheur théâtralisé, on le fonde sur une expérience collective partagée, une responsabilité croissante dans la vie publique, médiatique, professionnelle." BRUKNER P., ibid., p. 161.

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